Petite enfance, services de garde éducatifs et développement des enfants: État des connaissances

Préface

Préface La société québécoise, comme la plupart des sociétés occidentales, consid ère la famille comme une institution centrale de son fonctionnement et de son développement. Toutefois, ce n’est qu’au cours des quatre derni ères décennies que les familles sont devenues des cibles systématiques des actions de l’État. Qu’on pense aux efforts pour doter le Québec d’une politique familiale cohérente, notamment le régime d’allocations familiales, les congés parentaux à la suite de la naissance d’un enfant, les services de médiation familiale, les formules de garde des enfants et le régime de pensions alimentaires dans les situations de séparation ou de divorce, les services sociosanitaires aux familles vivant en situation de vulnérabilité socioéconomique et psychosociale et la protection de l’enfance et de la jeunesse. Qu’on pense aussi à d’autres préoccupations qui sont encore peu touchées directement par une politique générale de la famille, mais qui pointent de plus en plus dans le discours public: par exemple, la conciliation travail-famille et les services aux pères en X PETITE ENFANCE, SERVICES DE GARDE ÉDUCATIFS ET DÉVELOPPEMENT DES ENFANTS difficultés. De toute évidence, il faut ajouter à cet éventail de mesures étatiques la création, après des années d’efforts et de revendications de la part de milliers de parents un peu partout au Québec, d’un réseau public de services de garde éducatifs. En particulier, la mise sur pied de centres de la petite enfance constitue certainement une réponse sociale se situant à l’intersection de plusieurs préoccupations qui charpentent une politique générale de la famille au Québec. Pourquoi préfacer un livre portant sur les effets des services de garde sur le développement des enfants en commençant par présenter le cadre historique et sociopolitique de ces services? Pourquoi, plus particulièrement, rappeler ici le rôle qu’ont joué et continuent de jouer les parents (par exemple, par leur présence majoritaire sur le conseil d’administration des CPE) dans l’architecture des services de gardes éducatifs? Deux raisons motivent ce choix. La première raison repose sur la nature des travaux qui sont présentés dans cet ouvrage dirigé par Nathalie Bigras et Lise Lemay. La référence à des thèmes touchant la famille, les parents, les mères et les pères s’avère omniprésente dans la plupart des chapitres, ce qui tend à démontrer que la nature des effets des services de garde sur l’enfant peut difficilement être examinée hors du contexte des relations familiales que ce dernier entretient. Et c’est là l’une des qualités majeures du livre. Le lecteur y trouve non seulement des connaissances nuancées et à jour sur des thèmes tels que les répercussions des liens éducatrice-enfant et des activités des programmes éducatifs sur les différentes dimensions du développement des jeunes enfants, mais aussi des connaissances sur des thèmes tels que l’impact des caractéristiques de l’environnement familial et des relations parent-enfant sur les jeunes enfants. L’autre raison tient à la conception même de l’enfant qui se développe dans les sociétés occidentales. Cette conception s’appuie, comme certains auteurs le suggèrent dans le livre, sur une perspective écosystémique du développement humain, c’est-à-dire sur le fait qu’il existe une organisation sociale qui est responsable du bien-être et de l’évolution individuelle de l’enfant. Trois piliers conceptuels charpentent cette organisation sociale. Ainsi, l’enfant contemporain est «conçu» en termes de ses besoins, de son développement et de ses droits (voir la figure à la page suivante). Ces trois idées fondamentales servent à constituer un espace sociocognitif à l’intérieur duquel l’ensemble des acteurs autour de l’enfant (ceux qui sont directement en contact avec lui au quotidien, mais aussi ceux qui agissent sur lui de manière indirecte, à distance, sans le connaître personnellement) peuvent collaborer, se compléter, se questionner et s’épauler. Le but ultime de cette coopération sociale est, en premier lieu, de produire, pour tous les enfants, des modes de vie qui leur assurent qu’ils deviendront des adultes accomplis et des PRÉFACE...