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Le plaisir, ni noir ni blanc Si on reconnaît facilement la présence du plaisir lorsqu’il est franc et entier et qu’il atteint une certaine intensité, il n’en est pas toujours ainsi au quotidien dans les situations ordinaires. En effet, la plupart du temps, le plaisir n’est pas la seule sensation présente. Plusieurs couches d’émotions et de pensées peuvent coexister simultanément dans une relation qui peut à l’occasion être source à la fois de plaisir et de déplaisir. Le plaisir émerge ainsi au sein de situations et de relations ambiguës où il se mélange à d’autres sensations. Par exemple, on peut ne pas avoir de plaisir à participer aux travaux ménagers, mais aimer aider notre partenaire, aimer travailler avec tel collègue tout en n’appréciant pas l’odeur de son parfum, etc. De même, on peut éprouver du plaisir à être en relation avec une personne; on peut aimer la finesse de ses réparties, son sens de l’humour et son ouverture d’esprit. Parallèlement , on peut ne pas prendre plaisir à travailler longuement avec elle à cause de son excès de zèle et de son acharnement au travail. Notre plaisir à la côtoyer s’émousse devant son peu d’intérêt pour tout ce qui ne relève pas du travail. Par ailleurs, le fait de perdre le compagnon de conversation habituel avec qui on partageait ses pauses à discuter de son mécontentement au travail peut amener une prise de conscience du plaisir qu’on éprouvait à ces petits échanges anodins. Cette perte liée à l’arrêt de la relation (le compagnon a changé d’emploi) ou à sa transformation (il a changé d’équipe et s’efforce de manifester un intérêt pour ses nouveaux collègues) met en évidence le plaisir que cachait la situation plus globale de mécontentement. Dans ce genre de situation, le plaisir est parfois occulté par des déplaisirs liés au contexte plus large ou par la monotonie engendrée par la répétition des mêmes situations et des mêmes réponses. L’attention que l’on porte au plaisir d’être en relation avec telle ou telle personne est alors voilée. On prend conscience qu’elle était présente lorsqu’elle disparaît ou que la situation change. Tabler sur le plaisir 20 Le plaisir n’est ainsi jamais absolu ou permanent. Il reste toujours un élément de la relation qui pourrait être amélioré. Une fois atteint, le plaisir ne se maintient pas nécessairement de lui-même. Au contraire, l’habitude aidant, son intensité peut faiblir. Aussi, le plaisir est parfois plus difficile à cerner dans nos relations quotidiennes habituelles. Dans ces situations, le plaisir est souvent tenu pour acquis et on s’attarde plutôt aux désagréments du moment qui se surimposent sur le plaisir de la relation. Si on essaie de comprendre comment s’établissent ses propres relations de plaisir, on a parfois l’impression que les choses se sont faites d’ellesm êmes, à notre insu. On ne sait pas comment on a contribué à les construire. De même, mais à l’inverse, le plaisir, lorsqu’il est inhabituel, supplante les déplaisirs chroniques liés à une situation. Un plaisir inattendu attire l’attention. Par exemple, on porte plus facilement attention à une situation qui a étonnamment bien tourné qu’à une relation stable et plaisante. Par exemple, on remarquera le plaisir qu’on a à argumenter de manière imprévue avec tel ou tel partenaire. On remarquera le plaisir de câliner l’autre plus longtemps ou de manière inhabituelle; ou, encore, on sera surpris du plaisir éprouvé à provoquer, à expliquer, à partager nos soupçons, etc., alors que ce n’est pas notre mode habituel de relation. Aussi, même si de prime abord on pourrait croire qu’il est facile d’identifier et de reconnaître les situations de plaisir en relation, ce n’est pas si simple. Il est parfois difficile de percevoir le plaisir, parce qu’il est imbriqué dans le tissu même de nos relations et parce qu’il est généralement mêlé à d’autres émotions et sensations. Le plaisir ne se présente pas sur un mode binaire, noir ou blanc. Ce n’est pas aussi simple qu’«en avoir ou pas». Le plaisir est plus diffus. Aussi, reconna ître sa présence, percevoir les indices et...

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