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8 Partages entre pères et mères pour la résidence en alternance des enfants et recomposition des rôles de genre • • • Sylvie Cadolle 164 Aimer et compter? Promue comme l’expression privilégiée de la coparentalité requise après la séparation des parents, la résidence alternée paraît une avancée décisive vers l’égalité hommesfemmes , ouvrant aux mères autant qu’aux pères la possibilité d’un nouvel essor de leur vie privée et professionnelle. Néanmoins, elle est peu pratiquée: 14,8% des jugements de divorce (Lermenier Timbart, 2009, p.  3) en 2007 établissent une résidence en alternance et homologuent généralement des accords entre parents (80% des demandes de résidence alternée sont conjointes en 2003). En cas de désaccord, il semble que les pères veuillent l’entreprendre, et que les mères s’y opposent (Moreau et al., 2004, p.  10-11). D’après les avocats et les médiateurs familiaux, «certains pères attendent de la résidence alternée une diminution des sommes à verser à la mère», tandis que«certaines mères redoutent à l’inverse une réduction des sommes reçues du père» (Poivey-Leclercq, 2007). En effet, le versement d’une pension à la mère est prévu dans 90% des divorces avec résidence chez la mère, mais ce n’est plus le cas de ceux qui prévoient une résidence en alternance où cette pension n’est prévue que dans 23% des cas (Chaussebourg, 2007, p.  1; Chaussebourg, Lermenier et Carrasco, 2009, p.  23). En cas d’accord, la répartition des responsabilités parentales quant aux soins et à l’éducation des enfants, et celle de la charge financière qui leur correspond mettent en jeu les convictions de chaque parent quant à l’intérêt de l’enfant, mais aussi rapports de force, négociations et compromis, combinés, au moment de la séparation, à ceux afférents au partage des biens. La résidence en alternance «implique un équilibre délicat, difficile à maintenir au long des années» (Brunet et al., 2008, p.  36). Les partages, et parfois la résidence alternée elle-même, sont donc souvent remis en cause et modifiés, de façon consensuelle, unilatérale, ou par retour devant la justice. Pour mieux comprendre les modalités de ces partages et ce qui provoque les sentiments d’équité ou d’insatisfaction des parents pratiquant la résidence alternée, nous avons entrepris une enquête qualitative qui a porté sur 27 cas, 19 mères et huit pères appartenant à des ex-couples différents. Les écarts de salaire entre conjoints Ces parents appartiennent presque tous aux classes moyennes ou supérieures (Moreau et al., 2004, p.  8), la résidence alternée concernant très peu les milieux populaires. Mais la situation professionnelle et économique des hommes est bien différenciée de celle des femmes. Parmi les ex-couples de l’échantillon, 10 comprennent des femmes [3.141.47.221] Project MUSE (2024-04-19 00:02 GMT) Partages entre pères et mères pour la résidence en alternance des enfants 165 de même niveau professionnel que leurs ex-conjoints, mais dont trois seulement (une dentiste, une psychiatre, une femme travaillant dans l’événementiel) ont des salaires supérieurs aux leurs. Les 16 autres anciens couples unissaient des hommes cadres, ingénieurs, médecins, à des femmes secrétaires, vendeuses, artisanes ou travaillant dans l’éducation, le secteur social, artistique ou associatif. Enfin, une intermittente du spectacle et un gérant d’hôtel annonçaient des revenus aléatoires ou non déclarés. Plusieurs de ces mères ont travaillé à temps partiel ou ont interrompu leur ­ activité pendant quelques années après leur maternité, ce qui est banal (Pailhé et Solaz, 2006):«Il y avait des problèmes pour la nourrice, il aurait fallu en changer. C’est pas lui qui s’est arrêté, comme par hasard, c’est moi qui me suis arrêtée», dit Sophie qui a pris un congé parental jusqu’aux trois ans de sa seconde fille et n’a pas encore retrouvé d’emploi. Beaucoup de mères expliquent qu’elles ont choisi une vie professionnelle compatible avec la disponibilité aux enfants, telle Claire, professeur: «Je ne voulais pas être une femme qui travaille et qui voit...

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