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C h apitr e 14 Pratiques évaluatives et structuration du rapport parent-intervenant dans le champ du travail social en contexte de protection de la jeunesse Enjeux, défis et repères pour l’action Louise Lemay 14.1. La relation d’aide en travail social : de quoi s’agit-il ? Définir la relation d’aide en travail social suppose d’examiner les ­ catégories d’acteurs qu’elle met en lien, le contexte duquel elle émerge ainsi que sa finalité. Structurellement, cette relation réunit minimalement un intervenant (son organisation) et une personne concernée par l’intervention, comprise au sens large (individu, couple, famille, groupe ou communauté). Elle se situe dans un contexte d’aide qui confère au premier le rôle d’accompagner, et au second, celui d’être accompagné. Le contexte même de formation de la relation contribue à la structurer. En ce sens, elle n’est ni naturelle ou spontanée ni neutre. Lorsqu’il s’agit d’aborder la relation d’aide dans le champ du travail social, on ne peut faire l’économie d’examiner sa propre posture tant au plan épistémologique, théorique que pragmatique. Ainsi, notre conception s’enracine dans une vision du social inspirée de la théorie critique. D’emblée, nous privilégions le concept de «rapport» à celui de «relation». Sans négliger l’importance des dimensions intersubjectives en jeu au sein 314 Le travail social de toute relation d’aide, nous tenons à rendre explicites ses dimensions structurelles, la nature asymétrique de la relation et les enjeux de pouvoir, tant individuels que collectifs, qui la jalonnent. Ici, la relation psycho­ sociale renvoie à un rapport social, donc à un rapport de pouvoir. Au plan théorique, notre conception des rapports sociaux et du pouvoir emprunte à diverses disciplines: philosophie, psychologie sociale, sociologie, sciences politiques. La théorie de la structuration de l’action (Giddens, 1987) a largement influencé notre conception du pouvoir et notre cadre conceptuel pour l’analyse des rapports de pouvoir et des pratiques professionnelles au cours des dernières années (Lemay, 2009). Le pouvoir des acteurs, intervenant ou personnes accompagnées, renvoie à leur action, à leur capacité de faire une différence dans la situation qui les concerne. Au sein de ce rapport psychosocial, chacun a des raisons d’agir comme il le fait. Pour comprendre leur action, il faut donc en connaître la signification. Or, peu importe l’intention des personnes, leurs actions produisent parfois des conséquences intentionnelles ou non intentionnelles. Enfin, le pouvoir n’est pas que capacité individuelle d’action, il est aussi fonction de conditions sociales complexes et de luttes qui se jouent dans d’autres systèmes d’action (Hindess, 1982). Les conditions contraignantes et habilitantes des systèmes de pouvoir en jeu, ainsi que les droits et obligations des personnes dans un contexte donné, contribuent à circonscrire leurs possibilités d’action. Les personnes et le rapport qu’elles établissent entre elles sont donc situés dans un contexte où nombre de forces individuelles et collectives se jouent, donnant également sens à leurs actions. La pensée du philosophe Foucault (1975) influence aussi notre conception du pouvoir: un phénomène multiforme, vu comme autant de micropouvoirs s’immisçant au cœur de toute relation sociale. La conception «foucaultienne» du pouvoir est fort pertinente pour jeter un regard critique sur le pouvoir-savoir du professionnel et sur les dimensions sociales, politiques ou historiques agissant sur le rapport d’aide. Enfin, la réflexion s’appuie sur une vision du développement du pouvoir d’agir des personnes et des collectivités qui inclut la nécessaire prise en compte simultanée des dimensions individuelles et collectives en jeu dans l’analyse des situations et dans la conduite des interventions (Le Bossé, 2012; Lemay, 2007). Ce chapitre ne vise pas à définir les normes de pratiques ni les centrations d’analyse requises à une évaluation du fonctionnement social des personnes dans le champ du travail social. Le cadre de référence de l’Ordre professionnel des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec (OPTSTFCQ, 2011) encadre clairement cette pratique. Il ne vise pas non plus à rendre compte du processus complexe d’intervention psychosociale en protection de la jeunesse. Les pouvoirs, activités et procédures entourant cette pratique évaluative sont largement balisés [18.119.123.32] Project MUSE (2024-04-25 10:12 GMT) Pratiques évaluatives et structuration du rapport parent...

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