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3 c h a p i t r e L’InTerVenTIon MédICaLe eT MédICoLégaLe auPrès des enfanTs eT des adoLesCenTs VICTIMes d’agressIons sexueLLes Claire AllarD-DanSereau, M.D. Jean-yves FraPPier, M.D. RÉSUMÉ Ce chapitre tente de répondre à certaines questions quant à l’intervention médicale et médicolégale auprès des enfants et adolescents victimes d’une agression sexuelle. Quels indices d’ordre médical permettent de soupçonner une situation d’agression sexuelle chez un enfant ou un adolescent? Quand et où doit avoir lieu cette intervention médicale? Quels sont les éléments de l’histoire que le médecin doit recueillir ? En quoi consiste l’examen médical dans le contexte d’une agression sexuelle ? Quelles sont les particularités de l’examen chez la petite fille avant la puberté? Comment interpréter les données de l’examen? Quelles sont les limites de l’examen médical? Qu’en est-il des 98 L’agression sexuelle envers les enfants infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS)? Que sont les prélèvements médicolégaux? Le chapitre se termine sur quelques perspectives de recherche. La problématique de l’agression sexuelle contre les enfants est certes plus sociale que médicale. On a longtemps cru, à tort, qu’il revenait au médecin de prouver qu’une agression sexuelle avait été commise. Cette notion est encore véhiculée. En effet, des parents, sinon même des intervenants, réclament fréquemment un examen médical afin de prouver que l’hymen est «perforé» ou endommagé, et on cesse parfois toute autre investigation en l’absence de preuve médicale! Or, il s’agit d’une notion tout à fait erronée. Depuis les années 1990, il est reconnu que, le plus souvent, l’examen médical des victimes d’agression sexuelle est normal, comme le note l’étude de Muram (1989), et ce, même quand l’agresseur a fait l’aveu de l’agression (Adams, Harper, Knudson, & Revilla, 1994; Heger, Ticson, Velasquez, & Bernier, 2002; Muram, 1989). L’intervention médicale demeure importante, quel que soit le résultat de l’examen, et elle dépasse le simple examen de la région génitale et anale. Elle touche: • la collecte d’indices d’ordre médical ou comportemental permettant d’étayer les soupçons d’agression sexuelle, dont des confidences spontanées durant l’examen; • l’examen lui-même, avec l’identification et le traitement de lésions consécutives aux sévices; • le dépistage, si indiqué, et le traitement des ITSS; • la collecte de preuves médicolégales selon le délai de l’examen par rapport au dernier épisode d’agression (trousse médicolégale et médicosociale); • la prévention de la grossesse chez les enfants pubères ou de certaines infections; • la collaboration à la prise en charge psychosociale de ces enfants par l’établissement des besoins de protection et de suivi ainsi que le signalement au Directeur de la protection de la jeunesse (DPJ). [3.145.59.187] Project MUSE (2024-04-18 12:33 GMT) L’intervention médicale et médicolégale 99 Tout médecin pratiquant une intervention médicale doit aussi veiller à rassurer les victimes quant à leur intégrité physique. Outre ces différents points, ce chapitre abordera également l’interprétation des signes physiques retrouvés à l’examen ou lors des tests de laboratoire, ainsi que les limites quant à l’établissement de la «preuve» d’une agression sexuelle. 1. Historique Longtemps occulté ou considéré comme tabou, le phénomène des agressions sexuelles contre les enfants semble avoir été mentionné pour la première fois dans la littérature médicale occidentale au milieu du XIXe siècle, par un médecin français, Ambroise Tardieu (Labbé, 2005; Tardieu, 1857). Dans son étude sur les «attentats aux mœurs», Tardieu décrit différentes formes d’hymen et certaines lésions consécutives aux agressions sexuelles. Freud (1896) émet d’abord l’hypothèse selon laquelle l’inceste subi durant l’enfance pouvait être à la base de certaines névroses mais, rapidement, il se rétracte et met plutôt de l’avant sa théorie du complexe d’œdipe, concluant que les dires de ses patientes reflétaient plutôt leurs désirs sexuels durant l’enfance. Par la suite, pendant plusieurs décennies, le monde médical a nié l’existence...

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