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7 Les néo-vikings Héros hier, honnis aujourd’hui«The Viking financiers have sought refuge abroad. Their public relations experts say rehabilitating their images will have to wait until the financial blood-letting stops.» The Dallas Morning News, 10 décembre 20081 Pays des sagas et patrie des Vikings, l’Islande vit en partie d’une double et contradictoire réputation: celle d’avoir donné à l’Occident les textes littéraires les plus achevés du Moyen Âge, et celle d’être l’héritière de ceux qui ont, de Paris aux portes de l’Orient, terrorisé villes et villages par leur comportement agressif et belliqueux. Par la suite, longtemps sous domination danoise, malmenée par des fléaux de toutes sortes, l’Islande n’accède finalement à l’indépendance qu’en 9, puis atteint à la fin du XXe siècle une prospérité sans précédent, qui la hisse aux sommets des palmarès de richesse. Elle doit cette extraordinaire croissance à la libéralisation du commerce mondial, dont une jeune cohorte d’entrepreneurs a su habilement profiter, . Jim Landers, «Iceland’s road to bankruptcy was paved with U.S. ways», The Dallas Morning News, 0 décembre 2008. 112 La spectaculaire déroute de l’Islande d’une manière que les journalistes étrangers ont vite associée à une résurgence de l’époque viking. Voici par exemple comment Jim Landers trace dans le Dallas Morning News le portrait de cette génération conquérante: Over the last six years, a group of about two dozen young, U.S.-educated financiers took Iceland on a Viking voyage of acquisitions, grabbing airlines, banks, mortgage lenders and securities traders from Texas to Hong Kong2. Le terme «Néo-Vikings» (New Vikings, Vikings entrepreneurs, etc.) apparaît au cours des années qui précèdent la crise de 2008 et il est couramment employé pour désigner une cohorte de jeunes financiers qui contrôlent et propulsent le système économique islandais, et étendent son pouvoir à l’étranger, profitant de la libéralisation du commerce mondial et de la privatisation des banques islandaises au tournant du XXIe siècle. En 200, le professeur Robert Wade emploie l’expression lors d’une conférence controversée à Reykjavík, intitulée «New Vikings3 », dans laquelle il met en garde contre les excès de ce groupe et les dangers qu’il fait encourir. L’expression devient rapidement péjorative et ironique à mesure que l’empire bâti par les Néo-Vikings s’effondre. Par exemple, Sarah Lyall écrit dans The New York Times en novembre 2008: «Like the Vikings of old, Icelandic bankers were roaming the world and aggressively seizing business, pumping debt into a soufflé of a system.» Roger Boyes en parle comme d’une génération qui a adapté le caractère pillard des Vikings à notre époque: «If there are still Vikings in this Iceland, they are the financial marauders setting out for Britain or mainland Europe, not to pillage and plunder but to snap up a chunk of fashion house5.» D’ailleurs, avec les Néo-Vikings surgit dans le discours officiel un vocabulaire guerrier. Par exemple, le premier ministre Geir Haarde réagit aux commentaires négatifs des financiers étrangers contre l’Islande en déclarant qu’il est prêt à se porter à la défense de son pays: «[He] made clear he would defend the financial system with all the tools in his armoury6.» 2. Ibidem. 3. Emiliya Mychasuk et Emiko Tarazono, «Viking saga», Financial Times, 9 octobre 2008, p. 20. . Sarah Lyall, «Stunned Icelanders struggle after economy’s fall», The New York Times, 9 novembre 2008. 5. Roger Boyes, «Skating on thin ice», The Australian, 0 octobre 2008. 6. David Ibison, «Iceland wealth fund is proposed», Financial Times, 25 avril 2008, p. 2. Je souligne. [18.117.196.184] Project MUSE (2024-04-26 14:12 GMT) Les Néo-Vikings 113 À ses côtés, le président de la Landsbanki, le banquier Björgólfur Guðmundsson, déclare que: «the island needed a war chest to “protect the economy and economic management from setbacks”». Ces nouveaux riches réveillent un goût atavique pour les victoires, dont le temps semblait avoir depuis longtemps effacé les traces en Islande. Celui-ci réapparaît sous un jour nouveau, qui séduit malgré ses travers:«tales of fast cars, yachts and penthouses, accounting scandals and Russian money did...

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