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LA TOILE DE SURVIE Le Christian Science Monitor tourne le dos au papier pour mieux plonger dans le cyberespace Antoine Char JOURNALISME 34 La révolution Internet Imprimer ou ne plus imprimer? La question ne se pose plus pour le Christian Science Monitor. Depuis avril 2009, le plus petit des quotidiens nationaux américains a franchi le Rubicon médiatique: fondé en 1908 par la mystique Mary Baker Eddy, il a tourné le dos au papier si cher à Gutenberg pour tisser son avenir sur la grande Toile de l’Internet. Financé en bonne partie par l’Église de la Science chrétienne, le quotidien de Boston n’est pas le premier à renoncer au papier. The Capital Times du Wisconsin et The Daily Telegram du Michigan l’ont précédé en 2007. Dans une vidéo de dix minutes, diffusée le mardi 28 octobre 2008 sur le site Web du Monitor, la direction de l’ex-lilliputien journal (34 centim ètres sur 29) expliquait à ses lecteurs «aimant boire leur café en lisant le journal» sa décision qui a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le ciel médiatique américain. «Nous avons le luxe – l’occasion – de faire un saut que la plupart des journaux vont devoir faire dans les cinq années à venir […] tout le monde, tôt ou tard, va devoir effectuer cette transition» (traduction de l’auteur) (Yemma, 2008). Tout le monde, vraiment? Oui, si la publicité, pivot financier de la liberté d’expression, continue à piquer du nez. Aux États-Unis, les dépenses publicitaires annuelles dans les quotidiens et magazines se chiffrent à 47 milliards de dollars contre un peu moins de quatre milliards pour leurs versions en ligne. Jusqu’à tout récemment, rares étaient les quotidiens publiant des annonces publicitaires à la une. Après le Wall Street Journal et le USA Today, (le quotidien américain le plus vendu), le New York Times a fait le saut le lundi 5 janvier 2009. Un petit bandeau rectangulaire d’une hauteur de six centimètres, acheté par le réseau de télévision CBS. Sur la page frontispice du NYT, comme sur celle de tous les quotidiens américains, la publicité s’affiche désormais sans vergogne. Qu’arrivera-t-il quand elle se déplacera massivement sur le Web, suivant ainsi les jeunes séduits par la culture de la gratuité? Les revenus publicitaires des quotidiens américains baissent en moyenne de 10% par année depuis 2007 et ceux de leurs journaux en ligne grimpent annuellement du double. À titre d’exemple, la pub en ligne du Los Angeles Times permet désormais au quatrième quotidien américain (740 000 exemplaires , 500 grammes de papier en semaine, deux kilogrammes le dimanche) de payer ses 660 journalistes (ils étaient 1 200 en 2003). Le LAT, acculé à la faillite comme le Chicago Tribune, mettra-t-il lui aussi fin à sa version papier? [3.140.242.165] Project MUSE (2024-04-23 19:47 GMT) Journalisme 35 Dans l’ensemble, cependant, les quotidiens ne peuvent encore atteindre la viabilité économique avec leurs recettes publicitaires sur Internet. Ainsi, la publicité dans les pages du New York Times totalise le milliard de dollars annuellement, trois fois plus que celle du NYT.com. Du côté des petites annonces, c’est la véritable saignée. Elles ne représentent plus que le quart des recettes des quelque 1 500 quotidiens américains. Où sont-elles allées? En grande partie sur Craigslist. Fondé en 1995 à San Francisco, ce site, partiellement gratuit, affiche 30 millions de petites annonces tous les mois sur l’ensemble de ses pages en ligne. Par ailleurs, si les tirages continuent de chuter, contrairement aux coûts de distribution et de production d’un quotidien, que feront les journaux traditionnels? Pour Philip Meyer (The Vanishing Newspaper, 2004), la chose est entendue: le dernier quotidien sera imprimé en 2040. Le Christian Science Monitor a donc décidé de prendre les devants. Il ne tenait pas à rejoindre le cimetière des quelque 200 quotidiens américains ayant disparu ces vingt dernières années avec leurs 22 millions de lecteurs. JETER L’ENCRE SUR LE NET Le Monitor a très vite jeté l’encre sur le Net. C’était en 1995, deux ans après le San José Mercury News, premier quotidien au monde à être présent sur la Toile. Puis ce fut la folle ruée vers le Web. En quelques mois...

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