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1 c h a p i t r e«Tous les garçons et les filles de mon âge…» Attitudes, homophobie et tyrannie relative à l’homosexualité chez les adolescents des deux sexes dans les écoles Gilbert Émond Tous les garçons et les filles de mon âge Se promènent dans la rue deux par deux Tous les garçons et les filles de mon âge Savent bien ce que c’est qu’être heureux (Hardy, 1962) Ce passage de la chanson de Françoise Hardy évoque le plaisir des jeunes de connaître l’amour. On y souligne non seulement qu’ils et elles seront heureux s’ils sont en couples… hétérosexuels, mais on suppose également que l’ensemble des garçons et des filles est attiré par l’autre sexe. Il témoigne ainsi de l’existence d’une norme hétérosexuelle universelle à laquelle tous et toutes devraient se conformer. Un autre passage, cependant, évoque une dimension moins heureuse à l’intérieur de ce paradigme: 20 Diversité sexuelle et constructions de genre Oui mais moi, je vais seule par les rues, l’âme en peine Oui mais moi, je vais seule, car personne ne m’aime. (Hardy, 1962). Si l’auteure fait référence aux personnes hétérosexuelles qui vivent dans la solitude, qu’en est-il des autres, rejetés, seuls ou mal aimés aux marges de ce modèle unique? Longtemps, ils et elles ont vécu sans les mots pour dire et décrire leurs expériences, sans l’espace pour les vivre pleinement et sans chanson pour les célébrer. Il leur a fallu comprendre ces expé­ riences avec le peu d’outils qui se trouvaient à leur disposition, puis se tailler leur propre place dans un environnement social souvent hostile. Dans les dernières décennies, les gais et lesbiennes ont finalement gagné des droits, une visibilité et une certaine image positive. Le modèle hétérosexuel n’est plus aussi unique qu’il l’était, plusieurs jeunes savent qu’il existe d’autres façons de vivre. Cependant, les gais et lesbiennes ne sont pas toujours représentés positivement dans les interactions et les jeux adolescents, les insultes envers les «tapettes» et les lesbiennes n’ayant que légèrement changé de mots, ajoutant d’autres mots à leur palette, soit«gai», «lesbo» et «gouine ». L’ampleur exacte de cette tendance, remarquée par beaucoup d’intervenants du milieu scolaire, n’avait toutefois pas été évaluée au Québec, jusqu’à ce qu’une étude du GRIS-Montréal s’y intéresse. Ce chapitre présente certaines des données recueillies dans le cadre de cette étude et dresse un portrait des interactions à caractère homophobe parmi les jeunes des écoles secondaires.  . Le mot «lesbienne» était d’office une insulte, avant même de recevoir un qualificatif. Par exemple, si «maudite lesbienne» appuyait sur le mépris, «lesbienne» tout court suffisait à l’exprimer. D’où la grande réticence de plusieurs femmes homosexuelles de se nommer telles.  . L’expression «gouine» est moins connue et usitée au Québec. Elle est plus courante en France.  . GRIS-Montréal (Groupe de recherche et d’intervention sociale gaies et lesbiennes de Montréal – ). L’auteur était coordonnateur de la recherche à GRISMontr éal et chercheur principal pour cette étude. Pour le projet menant à cette publication, GRIS-Montréal a reçu une subvention du Programme de mobilisation des communautés du Comité conjoint de gestion de Justice Canada et Sécurité publique Québec (20062007 ). Toutefois, toutes les opinions énoncées ici n’engagent que l’auteur et aucunement les autres membres du GRIS-Montréal.  . Nous tenons à souligner l’immense et brillante contribution de Janik Bastien Charlebois aux contenus sous-jacents à ce texte et à certaines critiques qui ont permis de l’améliorer. En tant que coordonnatrice de la recherche et bâtisseuse de GRIS-Montréal, elle a contribué à construire les concepts et plusieurs contenus menant à la rédaction du pré­sent chapitre. [18.118.184.237] Project MUSE (2024-04-25 10:08 GMT) «Tous les garçons et les filles de mon âge…» 21 Avant d’introduire ces données, les impacts de l’homophobie sur les jeunes seront abordés afin qu’on puisse bien comprendre la portée d’un geste comme celui de l’insulte (section 1). Par la suite, la méthodologie de l’étude et la définition...

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