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2 C H A P I T R E ANCIENS ET NOUVEAUX OBJETS DE FASCINATION LE CORPS, L’INDIVIDU, LE POUVOIR On le rappelle, maints phénomènes et objets nous fascinent, il n’y a qu’à regarder autour de soi. Quoi qu’on fasse pour banaliser l’expression, la légitimité, la réalité, si l’on peut dire, du mouvement fascinatoire demeure. Et de certains pôles attractifs parmi lesquels figurent le corps, l’individu et le pouvoir. La rythmie déjà posée entre la puissance vitalisante de la fascination et ses aléas sera reprise dans ce chapitre. Depuis la donne des ressorts charmeurs, il s’agit de saisir les éléments culturels qui contribuent à faire de la fascination la voie obligée d’un état d’émerveillement par trop univoque, délétère à maints égards. LE CORPS L’INSCRIPTION IDENTITAIRE FONDAMENTALE, VIVIFÈRE Nous en avons traité à propos du processus d’individuation, la première reconnaissance de l’être-au-monde passe par le corps, le sien propre et celui de l’autre. Et c’est sur l’intentionnalité de cette considération, de son allure, que va se dessiner la partition depuis laquelle le sujet pourra 42 La fascination – Nouveau désir d’éternité s’exercer et «concerter» pour la vie. Mais le fait de ce corps concertant ne permet pas l’économie d’une posture qui est nourrie par l’histoire personnelle en même temps qu’influencée par la formation culturelle environnant le sujet. De fait, le corps est un indicateur éminemment sensible de notre rapport au temps. Surface et substance sont travaillées par le temps et en ce sens, il est son objet. Le temps le tire du magma, en esquisse les contours qu’il use et renvoie se perdre dans le creuset de la matière. Le corps ne peut pourtant se résumer à cette qualité d’objet car en s’établissant dans l’être qu’il «véhicule», il consolide et participe au statut même du sujet humain. Par suite et selon sa manière de s’incarner dans le temps, d’investir son époque, chacun traduit son adhésion plus ou moins entière aux mœurs et aux modes, aux croyances et aux règles entourant l’entretien et le maintien du corps, qu’il s’agisse de techniques corporelles, de médecine, de diètes alimentaires, de modalités de repos et de soulagement de la douleur, de vêtements, voire d’architecture. Aussi, lorsque l’on considère le développement humain, le corps apparaît comme le premier signal identitaire, l’enveloppe – le Moi-Peau1 – qui tout à la fois recouvre et révèle l’esprit – la psyché – constituant ainsi l’intégralité de l’être. Intégralité sacrée comme telle, au sens de valeur transcendante, de sorte que ni le corps ni l’esprit ne se chicaneraient cette attribution qui tiendrait plutôt dans l’intégration, l’intrication des deux, psyché et soma, ou les trois, si on inclut l’âme. Ce qui s’impose comme sacré, c’est tout ce que cette fusion corps-psyché permet d’inscrire, d’exp érimenter du vivant. De la sorte, arrivant au terme de ses jours, le corps retiendrait non pas un sacré intégral, mais un sacré historicisé, du fait même de son ancrage biographique, trajet porté par la psyché et inspiré – pour certains – par l’âme. Cette intégration – intégralité de l’être, dans son caractère humain à la fois intangible et inviolable, s’avère dès lors le premier marqueur identitaire conscient. Par conséquent, si un corps, c’est soi, soi, ce n’est pas que son corps: ce balisage entre l’entité – l’intégrit é – et le corps humain, toujours mouvant, est bien sûr fascinant. Au cours de la vie, c’est par ce mouvement entre ce que le corps agit et ce qu’il reçoit, entre le dehors et le dedans, entre le soi et le nonsoi , que se constitue le schéma corporel, que sont intégrés les techniques et usages du corps. Et, de même, l’identité. Ce qui détermine les règles 1. Selon Didier Anzieu, Le Moi-Peau, Paris, Dunod, 1985. [3.19.27.178] Project MUSE (2024-04-26 16:28 GMT) Anciens et nouveaux objets de fascination 43 de ce jeu, ce qui fera en sorte que le destin du...

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