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Économie : vers une politique nationale québécoise Michel Beauséjour Les premiers signes d’autonomie de la bourgeoisie canadienne par rapport à celle de la métropole britannique se manifestent avec la mise en place graduelle des ingrédients de la politique nationale du XIXe siècle, c’est-à-dire la responsabilité ministérielle obtenue en 1848 et ensuite la naissance du marché canadien intégré, protégé et propice à l’expansion des courants d’échange Est-Ouest. Ce modèle de développement constitue le fondement de la politique commerciale canadienne jusqu’à la Deuxième Guerre mondiale. Il contribue à la mise en place d’une politique de commerce extérieur protectionniste, réduit la concurrence, augmente artificiellement les prix et encourage l’importation de capitaux étrangers. L’intégration, au XIXe siècle, de l’économie québécoise au marché commun canadien a été créée de toutes pièces par l’imposition d’un protectionnisme exagéré qui a eu pour effet de préserver une structure industrielle fondée en bonne partie sur les industries légères. Celles-ci s’habitueront à des courses de production visant presque exclusivement le marché canadien captif. D’ailleurs, l’abaissement récent au Canada des tarifs et des contingentements sur les TVC (textile, vêtement, chaussure) nous dessille les yeux sur les difficultés d’adaptation de l’industrie québécoise et place, plus particulièrement, Montréal dans une situation économique des moins enviables parmi les grandes villes canadiennes. Cette intégration au marché commun canadien est aussi consolidée par l’orientation est-ouest des échanges économiques en subventionnant les voies 188 Économie : vers une politique nationale québécoise de communication interrégionales par la superposition d’un système bancaire très centralisé et par la domination économique exercée par la bourgeoisie anglo-saxonne de Montréal. Ultérieurement, les politiques fédérales de développement ont, d’une manière générale, négligé les dimensions régionales et culturelles. En conséquence , elles sont à l’origine d’un mécontentement profond au Québec. Il n’existe pas un seul domaine de compétence fédérale où les économistes canadiens-français conviennent d’emblée qu’une politique est indiscutablement avantageuse pour le Québec, à l’exception des paiements de péréquation. Que l’on traite d’énergie, de transports, d’habitation, de commerce international, d’immigration, de recherche scientifique, d’emploi, de monnaie, on constate le même scepticisme au Québec. Ainsi, durant un siècle, le Québec a été contraint de fonctionner à l’int érieur de ce marché commun canadien unifié, centralisé, protégé, un cadre qui n’était pas nécessairement conciliable avec les impératifs de sa croissance et de son développement économiques. Maintenant, serait-ce au tour de la société québécoise — ayant laissé tomber son nom composé de canadienne-française sachant qu’elle était appelée à n’être plus qu’une minorité comme les autres — de se détacher cette fois-ci de la bourgeoisie canadienne et de forger sa propre politique nationale ? Celle-ci se trouve déjà ancrée, depuis une trentaine d’années, dans la mise sur pied d’un grand nombre d’institutions publiques et parapubliques. Elle est aussi perceptible dans la francisation récente du capital, dans les visées souverainistes qui prendront forme d’une manière ou d’une autre à la suite de l’échec de l’accord du lac Meech, dans l’appui de la bourgeoisie politique et d’affaires du Québec à l’Accord de libre-échange canadoam éricain et dans la recherche d’une nouvelle cohésion sociale. Nous aimerions examiner ces différents éléments qui concourent à façonner le Québec de demain. L’État québécois La Révolution tranquille a servi de bougie d’allumage à la réorientation de la société canadienne-française. Les francophones du Québec se considèrent de plus en plus comme des Québécois et acquièrent la certitude qu’ils peuvent changer les structures socio-économiques pour permettre un développement collectif et national accéléré. L’État est promu au rôle de moteur du développement pour hâter le rattrapage. Entre 1960 et 1970, on met sur pied six nouveaux ministères, neuf conseils consultatifs, trois organismes de réglementation , un tribunal administratif et huit...

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