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Perspectives sur l’exclusion des sans-emploi en matière de sécurité du revenu Gérard Boismenu Introduction Le thème de l’exclusion est central dans les projets de révision de la protection sociale dans la plupart des pays occidentaux. Dans ce court texte, j’aimerais limiter le propos, en focalisant l’attention sur deux choses : formuler un certain nombre d’observations critiques concernant les politiques de sécurité du revenu à l’égard des sans-emploi qui sont en cours d’étude au Canada et, parallèlement, indiquer quelques repères pour une conception alternative, conception qui mettrait l’accent surtout sur l’inclusion des sansemploi dans un compromis social et politique. L’avenir du système de sécurité du revenu constitue un enjeu considérable pour toute société. Ce système a été le fruit d’histoires politiques particulières et, d’une société à l’autre, a exprimé de grands compromis sociaux sur lesquels il est difficile de revenir unilatéralement. Les droits sociaux, acquis avec le temps, sont appelés à être défendus chèrement, surtout lorsque les projets de réforme constituent une dénégation de ces droits, sans contrepartie. La volonté de l’actuel gouvernement libéral fédéral de revoir en profondeur le système de sécurité du revenu s’inscrit dans une mouvance qui est largement répandue. On ne saurait toutefois sous-estimer les écueils que représente une telle entreprise, écueils qui, bien au-delà de l’aménagement techniciste de programmes, ont au premier chef une résonance sociale et politique. Compte tenu de l’importance de ces enjeux, deux choses m’apparaissent primordiales. Il importe d’ouvrir largement une discussion qui, au-delà des mécanismes des programmes, portera sur les principes sous-jacents à un système 142 Contre l’exclusion : repenser l’économie de sécurité du revenu et sur la place de celui-ci dans le modèle de développement socio- économique retenu. Cette discussion, qui permettrait d’élaborer les grands repères de nouvelles règles du jeu, devrait aussi pouvoir mener à l’adhésion au moins implicite des grands acteurs sociaux et politiques. Il est certain qu’une démarche directive et l’établissement autoritaire d’une politique de cette envergure peuvent apparaître beaucoup plus expéditifs et plus efficaces à court terme. Mais, la méthode directive et autoritaire peut se révéler à terme contre productive. Chose certaine, une politique imposée tourne le dos à un modèle de développement qui compterait sur la concertation des acteurs, sur la capacité de définir des compromis entre intervenants privés et publics et sur l’élaboration d’objectifs généraux suscitant la mobilisation des acteurs. La réflexion que j’aimerais proposer ici porte sur la nécessité de faire dès à présent, avec les contraintes du moment, des choix qui vont dans le sens du long terme. En traçant la direction des réformes récentes touchant certains programmes majeurs au Canada, telles l’assurance-chômage et l’aide sociale, il faut tenter de comprendre si elles s’inscrivent dans une tendance porteuse pour assurer un modèle socio-économique au Canada. Protection sociale et système productif La tentation est grande de traiter de la protection sociale, et plus spécifiquement du système de sécurité du revenu, comme s’il s’agissait d’une question isolée, qui trouve sa justification en elle-même et qui entretient une relation fermée « de programmes à bénéficiaires ». Je plaide plutôt pour une vision « systémique » de la sécurité du revenu1 , en ce sens qu’il ne s’agit pas de mécanismes à côté ou en dehors de l’économie, mais plutôt de formes institutionnelles qui sont partie intégrante des relations économiques et du modèle de croissance à une période donnée de l’existence d’une société. Si l’on accable autant la sécurité du revenu aujourd’hui, c’est moins pour ses vices internes que parce qu’il s’agit de formes institutionnelles, héritées d’un passé récent, qui étaient sans doute en adéquation avec le modèle de croissance que l’on connaissait jusqu’aux années 1970, mais qui semblent incompatibles aujourd’hui avec des perspectives de croissance faible, un chômage massif qui se maintient et alors que le ma...

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