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ÉLÉMENTS DOCTRINAUX La question de la préservation morale de l’enfance et de la jeunesse n’est certes pas, à partir des années 40, une préoccupation nouvelle. Au Québec, dans l’amalgame des vérités doctrinales aux diverses considérations sociales et médicales, s’était élaboré et imposé tout un mode de régulation catholique1 . Les éléments doctrinaux sur lesquels s’appuyait le code prescriptif traditionnel ont sans doute été suffisamment évoqués dans les écrits des dernières décennies pour qu’il ne soit pas nécessaire d’élaborer longuement sur le sujet. Je me limiterai donc, même s’il ne faut pas en minimiser l’importance, à rappeler l’essentiel du grand code de moralité catholique. La chasteté comme principe fondamental de la loi Sur les bases des grands principes de tradition chrétienne en matière de sexualité (idéal ascétique, aveux, impératif de reproduction, etc.), la chasteté se pose encore, dans les textes de l’orthodoxie catholique des 1. Voici quelques ouvrages sur le sujet : Jean HAMEUN et Nicole GAGNON, Histoire du catholicisme québécois. Le XXe siècle, tome 1, Montréal, Boréal Express, 1984, 506 p. ; Nicole THIVIERGE, Écoles ménagères et instituts familiaux : un modèle féminin traditionnel, Québec, IQRC, 1982, 475 p. ; Nadia FAHMY-EID et Micheline DUMONT (dir.), Les couventines, Montréal, Boréal, 1986, 316 p. ; Lucia FERRETTI, « Mariage et cadre de vie familial dans une paroisse ouvrière montréalaise : Sainte-Brigide, 1900-1914 », Revue d’histoire de l’Amérique française, automne 1985, p. 233 à 251 80 Chapitre 5 années 30 et 40, comme la garantie fondamentale de l’ordre social ; elle est vue comme le seul moyen efficace de s’opposer « aux tendances de l’homme charnel2», c’est-à-dire aux passions « destructrices de la santé corporelle et des valeurs sociales fondamentales3». Dans une perspective sociale, la chasteté se présente à la fois comme un idéal de vertu et comme un principe de loi visant à refréner, hors du mariage, ou à modérer, dans le mariage, « l’usage des plaisirs de la chair4». La Providence divine, dans l’ordre des choses naturelles, a voulu donner ce plaisir comme une motivation à participer à l’œuvre de création. Il nous appartient donc d’en user avec mesure, comme d’un salaire, d’une récompense, car le plaisir de la chair n’est justifié et légitime que s’il correspond à la responsabilité de reproduction sanctionnée par l’Église. « Sauvegarde de nos foyers », « garantie de bonheur », une conduite vertueuse prépare des époux fidèles et honnêtes, tout en assurant la force et la prospérité de la nation. En contrepartie, la « luxure » menace gravement les affections familiales ; elle est facteur de dégénérescence physique et mentale des individus, elle mène inexorablement à la décadence des sociétés5 . Autour de ces principes, c’est bien connu, s’instaurent toute une série de règles et de prescriptions, ainsi qu’un ensemble de techniques d’intervention visant à encadrer de façon rigoureuse les comportements sexuels des catholiques. En référence à ces notions fondamentales s’établissaient des enjeux spécifiques dont l’éducation chrétienne devait se porter garante. L’individu devait faire de la chasteté un aspect essentiel de sa valeur morale ; il pouvait, par le fait même, l’afficher comme une mesure symbolique de sa grandeur d’âme. Dans le discours de l’orthodoxie catholique, cet impératif éducationnel était fortement imprégné de principes rigoristes. L’obéissance, la discipline, le sacrifice, la mortification de la chair, la culpabilité, la crainte de Dieu et des sanctions, tous ces 2. LETTRE PASTORALE COLLECTIVE (1946), « Croisade de la pureté », Mandements et lettres pastorales, vol. 20, Montréal, Arbour et Dupuis, 1952, p. 210. 3. Georges LEVASSEUR, « La chasteté », Nos cours, vol. 6, n° 9, 1944, p. 1. 4. Victorin GERMAIN, Catéchèse des sixième et neuvième commandements de Dieu, Québec, Action catholique, 1938, p. 49. 5. Les écrits qui reprennent ces éléments de doctrine sont fort nombreux. J’en mentionne quelques-uns encore : Mgr A. CAMIRAND, Le tutoiement des parents par les enfants et l’éducation sexuelle, Arthabaska, 1939, 10 p, ; A.-M. GRANGER, o.p., Comment préparer son mariage ?, Montréal, Les Éditions du Lévrier, 1946 (5e édition), 206 p. ; Chanoine A. HARBOUR, Le mariage...

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