Le travail professoral démystifié: Du rapport Angers au rapport Archambault

Chapitre 6. Travaux sur la satisfaction à l'égard du travail et des pratiques institutionnelles de gestion des professeurs

Le mémoire de maîtrise de Jean-Yves Le Louarn (1978) : constat d’un désir incessant d’autonomie professionnelle et des difficultés pour les professeurs d’université d’avoir des relations de travail satisfaisantes avec leurs supérieurs et leurs pairs Analyse de données empiriques recueillies en avril 1977 auprès de 153 répondants représentant l’ensemble des professeurs de l’Université de Montréal, cette étude ne porte pas d’abord sur les éléments constitutifs du travail de ces professeurs, mais bien sur leur satisfaction au travail1 . L’auteur qualifie de contradictoire le postulat de la haute satisfaction des professeurs à l’égard de leur travail et leur syndicalisation massive. Il définit au départ sa recherche comme empirique et exploratoire, plus fondamentale qu’appliquée, mais cherchant aussi, au-delà des descriptions, à identifier des phénomènes et à fournir des explications. Enfin, il présente ses résultats comme un « réservoir de données » et une « base de réflexion », laissant aux lecteurs la double tâche d’en dégager les conclusions et de fixer les actions à entreprendre. Cette recherche vise trois buts : 1) mesurer le niveau de satisfaction au travail des professeurs de l’Université de Montréal ; 2) dégager conséquemment les principales sources de satisfaction et d’insatisfaction au travail de ces mêmes professeurs ; Travaux sur la satisfaction à l’égard du travail et des pratiques institutionnelles de gestion des professeurs Pour la priorisation des besoins personnels et organisationnels 3) analyser la relation entre leur satisfaction à l’égard de divers aspects du travail professoral et sept caractéristiques personnelles et professionnelles, soit l’âge, le sexe, le champ disciplinaire, le dernier diplôme, le rang académique, le salaire et l’appartenance ou non à un syndicat. L’auteur postule qu’il est impossible de mesurer la satisfaction au travail d’un groupe d’individus par référence à la notion globale de travail et à partir d’une seule question, aussi bien formulée soit-elle. Le travail représente pour lui un objet multidimensionnel qu’on ne peut percevoir qu’en fonction de divers aspects qui doivent être au préalable clairement identifiés. Il sélectionne donc 20 paramètres du travail, à partir d’une revue des écrits américains sur la satisfaction au travail des professeurs d’université et de l’inventaire de la satisfaction au travail mis au point par Viateur Larouche, qu’il adapte cependant pour tenir compte de la spécificité de la population étudiée. Fait surprenant, il ne formule aucune question au sujet de la satisfaction des répondants à l’égard des composantes du travail professoral : enseignement, recherche, service interne, rayonnement extérieur. De nombreux ouvrages américains ont pourtant traité de cet aspect central de l’organisation du travail professoral ainsi que de ses conséquences sur la satisfaction au travail. À partir d’une échelle de 20 points, Jean-Yves Le Louarn cherche à mesurer le degré de satisfaction générale des répondants à l’égard de leur travail : la moyenne globale des 20 aspects considérés est de 11,99, alors que le devis initial de recherche établissait implicitement qu’une note de 12 et plus serait interprétée comme une manifestation de satisfaction. Prise en soi, de façon isolée, cette donnée n’a cependant que peu de portée. Il en va autrement des données relatives à chacun des paramètres préétablis du travail. Jean-Yves Le Louarn affirme, en effet, que les répondants sont particulièrement satisfaits des aspects intrinsèques de leurs tâches (autonomie : 15 ; variété du travail : 14,1), de leurs relations avec les étudiants (14,6), de leur statut social (12,4) et même de la lourdeur de leur charge de travail (12,4) ; par contre, ils se montrent plutôt insatisfaits de leurs relations avec leurs pairs (11,2), de leurs possibilités de promotion (11,2), de leurs relations avec leurs supérieurs (10,9), de leur rémunération (10,8), de leurs conditions matérielles de travail (10,5), et surtout de leurs activités qui n’ont pas directement un caractère académique (10,1) et de l’administration de leur institution (9,5). 60 Chapitre 6 Après avoir classé ces données selon cinq indices généraux de satisfaction, Jean...