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CHAPITRE 3 Définition du concept de catharsis à partir du texte du Cahier de prison 10 II 6, note I Présentation du texte Situation du texte Le texte que nous nous proposons d’analyser dans ce chapitre fait partie du dixième Cahier de prison. D’après les notes critiques établies par V. Gerratana1 et reprises substantiellement par R. Paris aux Éditions Gallimard, on peut situer entre avril 1932 et mars 1933 la période de rédaction des 94 textes qui constituent l’ensemble du dixième Cahier. Ces textes sont regroupés en deux parties : la première partie, comprenant 14 textes rédigés sous le titre Points de repère pour un essai sur B. Croce, constitue un condensé des thèmes qui seront développés dans le reste du Cahier ; la deuxième partie, comprenant 80 textes, s’organise autour de trois grands thèmes : Points pour un essai sur Croce2 , Introduction à l’étude de la philosophie, Points de méditation sur l’économie. Comme on peut s’en rendre compte, l’ensemble du dixième Cahier de prison porte la marque prédominante de la préoccupation qu’avait Gramsci, en prison, de régler ses comptes avec Croce, en particulier avec la conception crocienne des rapports entre histoire, philosophie et politique. Le système de Croce est construit à partir de quatrecatégories3 : la « Logique » et l’« Éthique », considérées comme catégories 1. Q vol. IV, pp. 2404-2405, (C, vol. III, pp. 13-14). 2. Q 10 111, vol. II, p. 1234 (C, vol. III, p. 40). 3. Cf. GT note 48, p. 194. universelles subsumant les catégories particulières, l’« Esthétique » et l’« Economie ». Gramsci fait de temps en temps un usage instrumental de cette classification, mais la plupart du temps pour la critiquer dans une perspective de refondation de la« philosophie de la praxis ». Le sixième fragment, intitulé Introduction à l’étude de la philosophie, est en fait un point de repère essentiel pour comprendre la perspective dans laquelle Gramsci se place pour écrire son anti-Croce : il s’agit pour lui de montrer comment la philosophie de la praxis intègre les éléments historicistes, antimécanicistes et antipositivistes de la philosophie crocienne, tout en dépassant cette dernière dans une conception renouvelée des rapports entre la philosophie et la politique. Dans la perspective de la philosophie de la praxis, la philosophie perd le caractère fondamentalement spéculatif, dont elle est entachée dans le système de Croce4 pour devenir philosophie en acte, ou politique ; la philosophie de la praxis conçoit la réalité des rapports de connaissance humains comme un élément d’« hégémonie » politique. C’est dans cette problématique des rapports entre philosophie et politique que prend toute sa signification le sixième fragment sur l’Introduction à l’étude de la philosophie. Le fragment est divisé en quatre notes sur : 1) le terme catharsis ; 2) la conception subjective de la praxis et philosophie de la praxis ; 3) la réalité du monde extérieur ; 4) la traduisibilité des langages scientifiques. Nous focalisons notre analyse sur la première note, dont voici le texte intégral : On peut employer le terme de « catharsis » pour désigner le passage du moment purement économique (ou égoïstico-passionnel) au moment éthicopolitique : l’élaboration supérieure de la structure en superstructure dans la conscience des hommes. Cela signifie aussi le passage de l’« objectif au subjectif », de la« nécessité à la liberté ». La structure, force extérieure qui écrase l’homme, l’assimile, le rend passif ; se transforme en moyen de liberté, en instrument pour créer une nouvelle forme éthico-politique, en source de nouvelles initiatives. La détermination du moment « cathartique » devient ainsi, me semble-t-il, le point de départ de toute la philosophie de la praxis ; le processus cathartique coïncide avec la chaîne de synthèses qui sont le résultat du développement dialectique. (Rappeler les deux points entre lesquels ce processus oscille : – aucune société ne se propose des tâches pour lesquelles n’existent pas ou ne sont pas en train d’apparaître les conditions nécessaires et suffisantes à leur résolution et aucune société ne meurt avant d’avoir exprimé tout son contenu potentiel)5 . Terminologie : mots clés et concepts clés La terminologie gramscienne renvoie à un univers culturel pluriel, ouvert, o...

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