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Le Québec connaît, vers 1960, un consensus s’appuyant sur quatre bases : le caractère nécessaire des réformes, l’acceptation de la modernité, la recherche d’une identité nouvelle et le renouvellement de la problématique du nationalisme. Ce consensus permet la coexistence de plusieurs formes de nationalismes, tant québécois que canadiens. En dépit d’une certaine antinomie, les deux variétés de nationalismes ne sont pas sans liens ni sans rapports. L’effritement du consensus, après 1966, fait voir des divergences idéologiques ancrées dans l’évolution socio-économique récente qui s’ajoutent à l’opposition entre les nationalismes. La décennie 1960 reste marquée par le phénomène de décolonisation et d’accession à la souveraineté de nombreux pays. Au même moment, en Amérique du Nord, c’est la revendication du mouvement noir aux ÉtatsUnis et des Québécois francophones au Canada. Sans vouloir forcer les comparaisons, il demeure que ces divers mouvements ébranlent, dans leur environnement politique immédiat, un équilibre qui s’était instauré antérieurement. De la même façon, ces mouvements reposent, en apparence du moins, sur une certaine forme de consensus. Cette dernière notion est prise dans son sens usuel de l’existence d’un large accord sur les objectifs communs à poursuivre. Les nationalismes québécois et canadien de 1960 à 1985 Jean-Claude Robert Université du Québec à Montréal Ce texte vise à examiner, dans le champ du nationalisme québécois, dans quelle mesure il y a consensus, et comme nous croyons que c’est le cas, comment ce dernier n’a pu exister que dans une courte période de temps et ne porter que sur un nombre précis d’objectifs. Cependant, deux autres éléments du contexte canadien et québécois nous semblent jouer un rôle fondamental à la fois dans l’élaboration du consensus et dans la perception qu’on en aura : il s’agit de l’évolution du nationalisme canadien, y compris sa composante essentielle que constitue un certain canadianisme latent chez une partie des Québécois francophones, et du processus d’élaboration de l’identité québécoise qui constitue, en fait, une mise à jour, une« modernisation » de la vieille identité canadienne-française. La première partie de ce texte porte sur l’essor du nationalisme canadien et ses liens avec le nationalisme québécois ; la deuxième analyse les bases de la formation d’un consensus au Québec entre 1960 et 1966, et la dernière examine la différenciation et les ruptures qui surviennent entre 1966 et 1985. L’essor du nationalisme canadien Longtemps, pour plusieurs Québécois francophones, c’était un lieu commun que de nier l’existence d’un nationalisme canadien, voire d’un sentiment national canadien, chez ceux qu’on appelait les Canadiens anglais. Ceux-ci étaient volontiers perçus comme des Britanniques de cœur et de fait, accrochés à un souvenir d’empire et voulant imposer cette vision à l’ensemble du Canada. La crainte des États-Unis constituait la motivation fondamentale, le ciment de l’union. Cette perception ignore complètement l’importance et la vivacité d’un sentiment national canadien en dehors du Québec. Par ailleurs, de la même façon, le rôle et la place du Québec dans cette vision nationale se trouvent escamotés. Pourtant, le Canada hors Québec a dû effectuer une série d’ajustements, précisément en fonction des exigences formulées par le Québec depuis 1960. Et ici intervient une distinction supplémentaire, celle de l’image projetée par les revendications du Québec. En effet, vues de l’extérieur, ces dernières ont l’apparence d’unanimité, ce qui a joué aussi un rôle dans la construction du consensus autour du nationalisme québécois. Mais nous y reviendrons plus loin. Il existe également des points de jonction entre les deux nationalismes. Non seulement il se produit un phénomène d’osmose important, mais aussi ils partagent certains traits communs, dont le moindre n’est pas le formidable poids de la présence et de l’influence des États-Unis. Bien sûr, on peut avancer que ce fait n’est propre ni au Canada ni au Québec, que l’ensemble 30 Chapitre 2 [13.59.36.203] Project MUSE (2024-04-23 11:28...

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