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CHAPITRE 2 SEXOANALYSE ET PROCESSUS SEXOANALYTIQUE Claude CRÉPAULT La sexologie clinique a été largement influencée par l’approche behavioriste. C’est sans doute le programme thérapeutique élaboré par Masters et Johnson (1970) qui contribua le plus à la promotion de la sexothérapie behaviorale. L’efficacité de cette thérapeutique semblait dépasser toute attente et, bientôt, de nombreux cliniciens s’intéressant aux désordres sexuels s’en inspirèrent ou l’appliquèrent telle quelle. Puis vint la désillusion, le désenchantement. On constata que les succès enregistrés n’étaient souvent qu’à court terme, du moins pour certains types de dysfonctions sexuelles (Levay, 1983 ; De Amicis et al., 1984). Tout en reconnaissant l’immense contribution de Masters et Johnson à la sexologie, je crois que leur paradigme clinique repose sur une conception plutôt simpliste de la sexualité humaine. Il semble que ce type d’approche soit surtout indiqué pour les dysfonctions sexuelles attribuables à des informations sexuelles erronées ou à des conflits sexuels mineurs. La principale faiblesse de l’approche sexobehaviorale réside dans le fait qu’elle ne tient pas suffisamment compte des corrélats Une version a déjà paru dans la revue Contraception-fertilité-sexualité, 1988, vol. 16, n° 9, pp. 771-780. 42 NOUVELLES AVENUES EN SEXOLOGIE CLINIQUE mentaux de la sexualité et surtout du clivage possible entre la conduite extériorisée et la réalité intérieure. Prenons à titre d’exemple le vaginisme, dysfonction traitée apparemment avec une très grande efficacité par le modèle mastersien. Dans ce cas, le fait que la femme soit capable d’avoir des relations coïtales (sans contracture vaginale et sans douleur) constitue le critère de succès. Mais il se peut fort bien que la nouvelle capacité coïtale ait peu de résonances érotico-affectives, et même que la femme n’ait aucun désir de se laisser pénétrer. À la limite, derrière la capacité coïtale peut se dissimuler une attitude de fermeture ; la capacité coïtale réelle peut alors cacher un vaginisme intrapsychique non résolu. Doit-on considérer cela comme un succès thérapeutique ? Prenons comme autre exemple l’homosexualité. Masters et Johnson (1979) prétendent avoir traité avec succès un certain nombre d’homosexuels en leur permettant de fonctionner adéquatement dans un contexte hétérosexuel. Encore là, la fonctionnalité « mécanique » ne veut pas nécessairement dire grand-chose et, à la limite, peut n’être qu’un leurre. À mon sens, la question la plus importante est de savoir si, dans ce cas, la capacité hétérosexuelle manifeste est investie sur le plan affectif et érotique, et si cela se répercute sur la fantasmatique. Malheureusement, Masters et Johnson et les cliniciens comportementalistes orthodoxes font abstraction de cette problématique. Le modèle sexothérapeutique développé par Helen Kaplan (1974, 1979) est, à cet égard, plus raffiné puisqu’il prend en considération la réalité intrapsychique et les forces inconscientes sous-jacentes aux désordres sexuels. En tentant de concilier les approches behaviorale et psychodynamique, Kaplan a séduit un bon nombre de cliniciens éclectiques. Hélas, elle n’a pas réussi à réaliser une véritable intégration de ces deux approches, et son modèle manque de spécificité. D’une part, elle a repris pour l’essentiel les techniques behaviorales développées par Masters et Johnson ou d’autres behavioristes. D’autre part, elle a situé les troubles sexuels dans une compréhension psychodynamique traditionnelle s’appuyant presque exclusivement sur la théorie freudienne. En abordant la problématique du désir sexuel, elle a certes donné une plus grande portée à la sexothérapie. La lecture qu’elle fait du désir sexuel (ou du non-désir) et de ses significations dynamiques reste toutefois assez sommaire. Des écrits plus récents donnent l’impression qu’elle est davantage préoccupée à trouver les substrats biologiques du désir et des autres désordres sexuels (Kaplan, 1983). Au cours des dernières années, il y a eu une recrudescence de nouvelles techniques sexothérapeutiques principalement d’inspiration behaviorale. Ces nouvelles techniques n’ont pas permis d’aller très loin dans la compréhension de la sexualité humaine. Dans l’ensemble, elles ont eu tendance à banaliser les désordres sexuels et à en faire des épiphénomènes. [18.116.51.117] Project MUSE (2024-04...

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