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CHAPITRE 6 LE PÈRE HOMOSEXUEL Claude CRÉPAULT Jean-Pierre TREMPE Récemment, Green et ses collaborateurs (1986) ont montré que les garçons dont la mère était homosexuelle ne manifestaient habituellement pas de problèmes sur le plan de l’identité et de l’orientation de genre, du moins pas plus que les garçons dont la mère était hétérosexuelle (et séparée du mari depuis au moins deux ans). Voici la conclusion de leur étude : Il est clair que les garçons et les filles élevés depuis le début de l’enfance par une mère homosexuelle et sans la présence d’un homme adulte dans la maison depuis environ quatre ans ne sont pas substantiellement différents par rapport aux paramètres du développement psychosexuel et psychosocial des enfants élevés par des mères hétérosexuelles sans la présence d’un homme adulte à la maison (Green et al., 1986, p. 182). Les garçons étudiés par Green et ses collaborateurs étaient trop jeunes (3 à 11 ans) pour qu’on ait pu évaluer leur orientation sexuelle (hétérosexuelle ou homosexuelle) ; tous avaient néanmoins une identité masculine et aucun ne pouvait être qualifié d’efféminé. Les résultats de cette recherche ne sont pas tellement étonnants. Si l’on se fie aux données de Stoller (1985), les conduites efféminées chez le garçon seraient favorisées par un « trop de mère », et plus spécifiquement par l’existence d’un 132 NOUVELLES AVENUES EN SEXOLOGIE CLINIQUE lien parasymbiotique mutuellement plaisant et prolongé entre la mère et le garçon. On peut supposer que les mères homosexuelles ne sont pas particulièrement enclines à encourager un tel lien avec leur garçon en raison de leur attitude plutôt rejetante envers les représentants du sexe masculin ; en ce sens, elles ne constituent pas un obstacle au développement de la masculinité de leur garçon. Par contre, il est possible qu’elles perturbent le processus d’hétérosexualisation de leur garçon ou, à tout le moins, qu’elles induisent des attitudes hétérophobiques chez leur garçon. Mais cela reste à prouver. À notre connaissance, il n’existe aucune étude empirique ayant mesuré l’impact du père homosexuel sur le développement sexuel du garçon. Nous n’avons pas trouvé non plus de rapports cliniques traitant cette question. Nous avons été amenés à nous interroger sur cette problématique lorsque l’un de nous a eu en consultation en bureau privé un déviant sexuel (exhibitionniste) dont le père était un homosexuel avoué. Dans le cadre de cet article, nous tenterons tout d’abord de situer le rôle du père dans le processus d’individuation masculine et dans certains troubles qui y sont associés. Nous formulerons ensuite quelques hypothèses concernant les répercussions de l’homosexualité du père sur son fils. Une illustration clinique permettra d’étayer ces hypothèses. Le rôle du père dans le processus d’individuation masculine Vers l’âge de deux ans, le garçon est amené à se définir comme sexuellement différent de sa mère. La naissance de cette identité masculine a pour effet de réactiver l’anxiété de séparation, laquelle se traduit par la hantise de se retrouver seul, complètement démuni. C’est en intégrant sa spécificité sexuelle, et plus particulièrement son pénis, que le garçon pourra en partie endiguer cette anxiété de séparation. Le garçon se donne l’illusion d’être autosuffisant et de pouvoir se passer de sa mère ; le pénis devient alors l’équivalent d’un objet transitionnel. Mais plus le garçon intégrera sa spécificité sexuelle, plus il sera aux prises avec la menace d’être à nouveau féminisé par sa mère. L’anxiété de féminisation, dont il est ici question, ne fait pas référence uniquement à l’anxiété de castration, mais correspond fondamentalement à la crainte de perdre son identité masculine ; à un niveau plus profond, elle se confond avec la crainte d’être réenglouti par la mère et donc de perdre son identité personnelle. Le garçon sera dans une position d’ambivalence par rapport à sa mère : d’un côté, il désirera que celle-ci puisse combler ses...

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