In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

Dans les sociétés occidentales avancées, l’agriculture de groupe est apparue aux lendemains de la seconde guerre mondiale. L’émergence d’une réflexion diffuse sur la collectivisation de la production agricole et l’expérimentation de certaines formes associatives en agriculture, sont en étroite relation avec une modification profonde de ces agricultures engagées dans un modèle d’intensification et de concentration de la production agricole. La doctrine productiviste allait guider la politique agricole et, favorisant une industrialisation accélérée de l’agriculture, elle entraîna une rapide diminution des exploitations agricoles organisées selon la logique de l’économie paysanne ou de la petite production agricole sur la base d’un procès de travail familial. La soumission de l’agriculture à la régulation marchande menace la reproduction des petites unités de production agricole dont le travail social n’est validé qu’à l’aune de la fraction du travail agricole qui aboutit à une production mise en marché. Dans un premier temps, les petits producteurs ont pensé préserver leur mode de produire tout en participant au développement d’un système agro-industriel et alimentaire en s’engageant résolument, par la coopération, dans ce processus. Les grandes institutions coopératives agricoles ont toujours été perçues comme un moyen de préserver la ferme familiale. Mais les producteurs qui ont développé une riche et profonde tradition de coopération apparaissent par ailleurs très individualistes dans l’organisation immédiate du procès de travail agricole sur leur exploitation familiale. La coopération ne pouvait concerner que l’aval et l’amont de la production agricole. Mais le modèle dominant de développement agricole qui semblait avoir trouvé, avec la coopération agricole, un équilibre entre la rationalité de l’économie marchande et celle CHAPITRE V L’agriculture de groupe 202 AGRICULTURE ET DÉVELOPPEMENT RURAL des petits producteurs agricoles autonomes, remettait en cause cet équilibre car la nécessaire industrialisation de l’agriculture apparaissait contradictoire avec les structures de l’exploitation agricole familiale. Les premières réflexions sur l’agriculture de groupe seront le fait de couches d’agriculteurs relativement plus jeunes et prêts à participer à la modernisation de l’agriculture mais qui veulent préserver le contrôle de leurs moyens de production et de leur procès de travail. Aussi, l’agriculture de groupe dans le monde occidental signifie, dès ses premières expressions, une tentative de sauver la ferme familiale menacée par une adaptation aux contraintes qui résultent de son insertion dépendante dans l’économie marchande :« Pour ces pionniers, il est nécessaire que les agriculteurs prennent place dans le secteur de l’économie de marché, ce qui signifie mécanisation et concentration ; mais il faut en même temps absolument sauvegarder l’exploitation familiale qui constitue le cadre le plus apte à sauvegarder la dignité de l’agriculteur et l’intérêt qu’il porte à son travai1163» Les formules associatives élaborées à la suite de cette prise de conscience des menaces qui pèsent sur l’agriculture familiale, se résument à une collectivisation partielle du travail et des moyens de production ; elles ne remettent jamais en cause la propriété familiale de l’exploitation agricole. À partir d’une recension des formes d’organisation du travail agraire qui se donnent à voir comme des formes de l’agriculture de groupe, une étude de l’OCDE conclut à un phénomène de résistance des petits producteurs qui tentent de contrôler les mécanismes de leur intégration à l’économie marchande :« seems to be to safeguard existing farm structures against the possibility of fragmentation on inheritance. It may perhaps be said, even before any further analysis is attempted, that this type seems to aim at preserving existing structures rather than encouraging change (...). It must be made quite clear that, contrary to what is often imagined, group farming in no way involves collective ownership of land and in this it is therefore quite different from the Yougoslav combinats or the Kolkhozes. In practically all cases each member of 163. Yves CHATHELINAUD, « L’agriculture de groupe, une nouvelle conception de l’entreprise agricole », Revue agricole de l’OCDE (1), 1972, p. 8. [3.144.143.31] Project MUSE (2024-04-26 17:54 GMT) L’AGRICULTURE DE GROUPE 203 the group continues to retain the ownership of his land164» Malgré l’inquiétude des milieux professionnels agricoles devant les mutations...

Share