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8. INTRODUCTION La succession chronologique des oeuvres eudésiennes (1648-1680) L’attention nouvelle donnée au cœur dans l’organisation du microunivers eudésien nous est révélée par un ouvrage paru à Autun en 1648. Il s’intitule : la Dévotion au très saint Coeur et au très sacré Nom de la Bienheureuse Vierge Marie. En 1650, Eudes réédite son livre, à Caen, mais celui-ci comporte cette fois un « discours » sur l’origine, le fondement et le sujet de cette dévotion... Deux autres éditions, celles de 1663 et de 1666 feront encore accroître la manifestation faite sur le cœur et découvrir, par des variations mineures apportées au texte, des précisions opportunes. Principalement, dans l’avantpropos de l’édition de 1663, l’auteur révèle qu’il a commencé depuis quelque temps « une grande pièce » dont le présent écrit n’est qu’un échantillon. L’ouvrage annoncé, l’auteur réussit à l’achever quelques jours seulement avant sa mort, survenue en 1680. L’édition posthume, publiée en 1681, parut sous le titre : le Coeur admirable de la très sacrée Mère de Dieu1 . Cette impressionnante production littéraire n’est pas simple amplification d’un thème uniforme. Jusqu’en 1672, Eudes s’emploie à manifester le « Cœur de Marie », mais dans ce syntagme il inscrit deux cœurs : celui de Marie et celui de Jésus. En 1672, il donne une autonomie inédite à la dénomination « Cœur de Jésus » et institue un culte spécial pour ce cœur afin d’en souligner l’estimabilité. D’où le remaniement de l’office, de la messe du Cœur de Marie, en circulation depuis 1648, bref une modification de la manifestation que l’œuvre monumentale du Coeur admirable achèvera de fixer dans sa forme définitive. 1. Dans notre analyse, le titre de l’ouvrage de 1648 sera représenté par le sigle DCM ; celui de 1681 par le sigle CA. À moins d’indications contraires, les chiffres entre parenthèses dans une citation renvoient au numéro des pages de la DCM insérée dans le t. VIII des œuvres complètes de Jean Eudes. 142 LA STRUCTURE SÉMANTIQUE La succession chronologique des œuvres chargées de la manifestation du cœur eudésien nous fournit un découpage mieux approprié de notre matière. Toutes les publications sur le cœur, parues entre 1648 et 1672, peuvent être réunies en bloc pour constituer la matière à inventorier en premier lieu. Cette étape dans la description du cœur présente, entre autres avantages, celui de dégager un modèle plus condensé, avant d’entreprendre l’analyse du Coeur admirable, pour y discerner comment Jean Eudes articule cette fois les éléments en vue d’arriver à la manifestation explicite de deux Cœurs au lieu d’un seul. 8.1. Les nouvelles articulations du discours eudésien en 1648 Déjà, dans Vie et Royaume de Jésus dans les âmes chrétiennes2 , le lexème cœur s’était révélé, par son réseau sémémique d’une particulière amplitude, apte à produire une écriture polysémique. D’autres lexèmes munis de sémèmes équivalents partageaient avec lui la manifestation de l’intériorité. Ces concurrents lexématiques (sein, entrailles, corps, etc.) appartenaient, comme cœur, au système métonymique qui maintient dans la zone anthropomorphique les limites de la communication. Or, il est curieux de constater que l’avènement de cœur au centre d’une manifestation discursive, à partir de 1648, introduit d’emblée une sorte de recueil de métaphores du cœur jusque-là inédites dans l’œuvre eudésienne et empruntées surtout au monde extérieur. Du même coup, la métaphore du cœur a relégué loin derrière elle tous ses substituts métonymiques pour passer au premier plan du discours sur la Vierge et développer au maximum sa virtualité sémique. 8.2. Les sources du discours sur cour Quant au problème des sources de la notion eudésienne de cœur, il se trouve en partie résolu par l’indication, dans la DCM, des auteurs et des ouvrages où Jean Eudes a puisé. Mentionnons d’abord, dans la Bible, deux versets de saint Luc (II, 19 et 51) et le...

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