Observer les oiseaux au Québec, 2e édition

Chapitre 1. Un loisir à la portée de tous

1. UN LOISIR À LA PORTÉE DE TOUS On dit avec raison que les oiseaux sont le thermomètre de l’environnement. Quiconque se donne la peine de chercher ce qui se cache derrière des choses à l’apparence parfois aussi banale qu’une plante, un insecte ou un oiseau, est assuré de se voir révéler une dimension jusqu’alors inconnue du monde qui nous entoure. L’observation des oiseaux se compare avantageusement à la plupart des activités de loisirs. Ouvert à un éventail très large de la population, ce loisir de plein air constitue un sain délassement et un enrichissement de l’esprit. L’ornithologie amateur peut être également un tremplin permettant l’accès à des préoccupations scientifiques qui sont loin d’être sans valeur. Ce n’est donc pas sans raison que le Livre Blanc sur le loisir au Québec (On a un monde à récréer, 1979) considère que les activités de loisir scientifique sont collectivement enrichissantes et « méritent d’être efficacement encouragées ». Observer les oiseaux, c’est s’ouvrir à tout un monde de réalités fascinantes comme l’évolution ou l’écologie, notions qui deviennent évidentes aux yeux de l’observateur le moindrement perspicace. 13 Bien sûr, ces notions n’ont pas toujours été aussi claires. Beaucoup seront heureux d’apprendre que les ornithologues amateurs ont joue, et jouent encore à l’heure actuelle un grand rôle dans l’accroissement de nos connaissances scientifiques. Au siècle dernier, l’étude des oiseaux était l’apanage d’individus bien nantis qui pouvaient disposer du temps et de l’argent nécessaires à l’accumulation d’imposantes collections de spécimens. Il s’agissait souvent de personnes ayant reçu une formation médicale ou similaire, que la passion des oiseaux avait amenées à s’imposer comme autorités dans le domaine. Certaines des collections ainsi réalisées ne représentaient en fait qu’un amalgame de curiosités ; d’autres, mieux conçues, servirent de base à d’importants musées. D’ailleurs, une bonne partie de ce que nous connaissons aujourd’hui sur l’anatomie, la classification et la distribution des oiseaux vient du travail qui s’est accompli dans ces musées naissants. Quel contraste avec ce qui se vit de nos jours ! Les observations de milliers d’amateurs sont rassemblées dans des rapports saisonniers sur l’avifaune de l’Amérique du Nord ; des milliers de dollars sont dépensés chaque année par les citoyens pour nourrir les oiseaux d’hiver qu’ils attirent à leurs postes d’alimentation. Combien d’excursions sont entreprises aux quatre coins du canton, du pays ou du continent, à la poursuite de « l’oiseau rare » qu’on ne trouve pas près de chez soi ? Combien de photographies d’oiseaux, parfois superbes, sont prises par des amateurs, souvent à deux pas d’un centre-ville ? Et, enfin, combien d’interventions populaires pour la sauvegarde des espaces verts urbains émanent de citoyens conscients de la nécessité de sauver l’habitat trop souvent violé de la gent ailée ? Que s’est-il passé depuis la fin du siècle dernier pour que les oiseaux suscitent un tel intérêt ? 14 OBSERVER LES OISEAUX AU QUÉBEC D’abord, la diminution évidente de diverses espèces entraîna l’imposition de restrictions à la chasse aux oiseaux et à la cueillette d’œufs, pratiques qui, jusqu’alors, n’avaient jamais vraiment été réglementées. Par ailleurs, la valeur économique des oiseaux et leur incidence sur la chasse, la pêche et l’agriculture nécessitaient l’étude de leurs comportements et de leurs liens avec l’environnement. Ces nouvelles études, maintenant poursuivies par des biologistes professionnels, ne pouvaient être effectuées uniquement à partir de spécimens et exigeaient plus d’observations sur le terrain. Enfin et surtout, la jumelle, l’appareil photographique et le guide d’identification se sont substitués au fusil comme principaux outils de l’ornithologue et ont rendu possible l’observation scientifique des oiseaux sans qu’il faille entreprendre de coûteuses et laborieuses collections. Aujourd’hui, bien des aspects de la vie des oiseaux ont trouvé une explication scientifique. Cependant, même si des générations d’experts les ont étudiés, l’observation de la migration des oies ou du tambourinage des pics garde toujours son intérêt pour...