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L’Arménie, une république cernée d’ennemis Aux prises avec des centaines de milliers de réfugiés du NagornyKarabakh et de sinistrés du tremblement de terre de 1988, l’Arménie a trop de soucis et d’ennemis pour entretenir, à l’instar de la Moldavie et des républiques baltes, des velléités d’indépendance vis-à-vis de Moscou.« Nous partageons l’approche des états baltes sur l’auto-gestion, la décentralisation administrative et la politique linguistique », déclare le premier secrétaire du Comité du Parti communiste pour la région de Sovietsky, Vladimir Toulïane, « mais nous ne voulons pas nous séparer de l’URSS. Nous voulons rester à l’intérieur du bloc soviétique ». Habitée par seulement 2 % de russophones, cette république, située à la frontière de l’Europe et de l’Asie, ne s’est jamais sentie menacée par la politique de russification du gouvernement central.« L’Arménie est la seule république où la langue de la population locale, l’arménien, est dans les faits la langue de l’État », signale l’écrivain Karen Simonian, député du peuple représentant l’Arménie au Congrès de l’URSS. En vérité, les adversaires traditionnels de la Géorgie ne sont pas les Russes. « Mis à part la Géorgie, nous sommes entourés d’ennemis », constate sombrement l’adjoint au rédacteur en chef du quotidien Kommunist, Grigorïan Gegham, faisant allusion aux deux voisins islamiques, la Turquie et l’Iran, éternels envahisseurs de l’Arménie, et à l’Azerbaïdjan contre qui elle se bat depuis 50 ans pour le rattachement du Nagorny-Karabakh. « Il ne serait pas dans notre intérêt de parler de sécession », fait observer celui qui ne croit pas en la possibilité de séparation ni pour l’Arménie ni pour les républiques baltes d’ailleurs. Capitale surpeuplée Là comme partout en URSS cependant, la glasnost et la perestroïka suscitent des attentes et des espoirs. Sur le plan économique, les Arméniens aimeraient, par exemple, profiter de l’assouplissement du régime pour créer un marché libre et nouer des relations commerciales avec des pays étrangers. Mais des problèmes plus urgents retiennent l’attention des dirigeants comme les cortèges de réfugiés et de sinistrés qui encombrent les rues de la capitale. Estimée à 1200 000 en temps normal, la population d’Erévan s’est accrue des deux tiers au cours de l’été atteignant 2 000 000 d’habitants. Pareil excédent de personnes n’est pas sans inconvénients ni conséquences sur l’économie de la république déjà mal en point avec le rationnement, depuis deux ans, du café, du sucre et du beurre. « La viande est presque disparue des comptoirs d’alimentation et l’habitation est devenue le problème majeur d’Erévan », constate Mnatzakan Zohrabïah, rédacteur en chef de L’Avant-Garde, un journal publié trois fois la semaine à l’intention des jeunes. « Le logement arrive au premier rang des préoccupations de nos lecteurs, insiste-t-il. C’est la principale récrimination des jeunes ménages qui doivent patienter des mois, parfois des années, pour obtenir un appartement qui, la plupart du temps, les décevra en plus de ne pas répondre à leurs besoins. » Il faut dire que l’Arménie, depuis trois ans, joue de malchance. Les catastrophes naturelles s’ajoutent aux difficultés économiques qui affligent le pays tout entier de la Baltique au Pacifique et de l’Arctique à la frontière chinoise. L’échec du socialisme, là comme ailleurs, n’est plus guère contesté. « On nous a toujours dit que le capitalisme était un système qui exploitait les travailleurs », fait observer au passage le rédacteur 40 [3.140.185.147] Project MUSE (2024-04-24 21:44 GMT) en chef de L’Avant-Garde. « Mais l’ouvrier exploité en Amérique gagne suffisamment pour vivre, tandis que l’ouvrier exploité par l’État ici n’a que de quoi survivre. » Depuis le séisme qui a anéanti six grandes villes, rasé 59 villages et partiellement détruit 350 hameaux, le problème du logement a, en vérité, pris des proportions alarmantes d’un bout à l’autre de la république. Le nombre d’individus en perpétuel déplacement ou...

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