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Étude des représentations et des relations entre parents et intervenants d’un quartier défavorisé Catherine SELLENET Maître de conférences en psychosociologie à Nantes, France Chercheur au GREF, Paris X, Nanterre Les représentations sociales se présentent sous des formes variées, plus ou moins complexes : «images qui condensent un ensemble de significations ; systèmes de référence qui nous permettent d’interpréter ce qui nous arrive, voire de donner un sens à l’inattendu, catégories qui servent à classer les circonstances, les individus auxquels nous avons affaire ; théories qui permettent de statuer sur eux » (Jodelet, 1992). C’est dire combien les représentations sont au cœur des interventions sociales, combien elles sont actives, guidant les politiques d’intervention, suscitant des interprétations et des pratiques quotidiennes. Et pourtant rares sont les études qui décryptent les représentations sociales des intervenants auprès des familles, encore moins celles des parents eux-mêmes tant ceux-ci restent muets.« Parle qui sait dire ce qu’il veut dire, quand il a le sentiment qu’il peut le dire, ou mieux encore qu’il le doit. Si de tous temps on lui a dit qu’il doit se taire, s’il doute qu’il y ait à dire, de savoir le dire ou d’être entendu, que fait-il d’abord ? il se tait…» (Verret, 1998). Les parents défavorisés se taisent, ne nous laissant que peu accès à leurs représentations du monde, des interventions dont ils sont l’objet, interventions censées les aider mais qui parfois leur pèsent et les contraignent. C’est pour rompre avec ce double point aveugle que l’étude présentée ci-dessous centre son objet sur les idées et les pratiques qui prévalent en Étude des représentations et des relations entre parents et intervenants 261 261 261 261 261 milieu défavorisé, tant au niveau des professionnels que des usagers. La recherche-action, menée dans un quartier défavorisé de la région nantaise (département Loire Atlantique, France), a pour origine un triple constat : – L’existence sur le quartier d’une multitude d’interventions ciblées mais non articulées entre elles ; – Un désintérêt de la population concernée pour les structures propos ées, ou à l’inverse une « attitude consommatrice » regrettée par les professionnels de ces services ; – Un face-à-face problématique, quand il existe entre parents et intervenants, ou le plus souvent des stratégies d’évitement et de fermeture des familles. Ces problèmes ne sont certes pas nouveaux, mais ils prennent, semble-t-il, une tonalité particulière dans un temps où les notions de partenariat et de coopération ont le vent en poupe. La municipalité ellem ême, dès 1990, dans son programme de développement social urbain prônait: « de mettre en œuvre dans les quartiers d’habitat social, une forme nouvelle d’action publique. L’ambition était de substituer le partenariat au repli sur soi, l’ouverture au cloisonnement, de privilégier la concertation aux décisions autoritaires, de donner la primauté du qualitatif au tout quantitatif ». Le message avait été entendu mais neuf ans plus tard, les effets de cette nouvelle politique ne sont guère au rendez-vous. Du côté des professionnels, la désillusion est dès lors plus grande, le sentiment d’échec plus aigu et plus intense le questionnement sur le sens des missions. Dès lors, les professionnels développent des « théories spontanées » pour expliquer et donner sens aux problèmes rencontrés. Parmi ces savoirs constitu és sur la cité, on trouve notamment : – L’hypothèse de la dilution du lien social dont, plus que d’autres, ces familles souffriraient. Le repli sur la famille, l’absence de convivialit é et de sociabilité dans la cité en seraient les signes. Cette théorie vient expliquer les difficultés des intervenants, justifier la désaffection pour les structures proposées. – La deuxième théorie utilisée massivement est celle de la « démission parentale » et de la perte des valeurs, constitutives des modifications de la société et de la famille. Les parents de la cité seraient«démissionnaires», «peu mobilisables», «dépassés» par les exigences de notre société. – Enfin, et à contrario, on assisterait à une « parentalisation » des enfants. Ceux-ci se verraient conférer les attributs de l’adulte : pouvoir de décision, pouvoir de s’opposer, pouvoir...

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