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L’autoroute électronique : enjeu social Lyne BOUCHARD Professeure Faculté des Sciences de l’administration Université Laval La présente conférence porte sur les politiques, les structures industrielles, les stratégies d’entreprise et les usages sociaux des nouvelles technologies qui peuvent favoriser ou contrarier l’implantation des routes informationnelles devant conduire les sociétés contemporaines vers le XXIe siècle. En prévision du futur, il semble important d’abord de nous situer tous. Où en sommes-nous dans notre cheminement vers l’autoroute de l’information ? En fait, l’ère de l’information est survenue durant les années 70, alors que le pourcentage de travailleurs appelés knowledge workers a dépassé celui des travailleurs du secteur de l’agriculture et de l’ère industrielle. Les investissements des entreprises ont suivi, et dès 1991, des sommes plus importantes étaient consenties au capital relié à l’ère de l’information plutôt qu’à celui relié à l’ère industrielle (Stewart, 1994). Il est estimé qu’aux États-Unis, près de 150 millions d’Américains possèdent une adresse électronique, un téléphone cellulaire, un Pagette, un télécopieur, une boîte de messagerie vocale et un répondeur téléphonique. L’année dernière, 18 millions de sollicitations téléphoniques ont été réalisées par des entreprises de télémarketing aux États-Unis, et près de 12 milliards de messages ont été laissés dans une boîte téléphonique (Tetzeli, 1994). Lors d’un sondage auprès de dirigeants et gestionnaires d’entreprises, 58 % des répondants ont indiqué préférer laisser un 228 Lyne Bouchard message à un système de messagerie plutôt que de parler à une personne (Stewart, 1994). Sur le super-réseau Internet, 300 giga-octets de données, soit un demimillion de livres de 250 pages, sont transigées chaque jour, aux États-Unis seulement. Le réseau privé Compuserve, quant à lui, offre plus de 2 000 services à ses deux millions d’abonnés, dont 100 000 se retrouvent dans son marché européen (Voizeux et al., 1994). Lors de la journée la plus achalandée du réseau Prodigy, le 3 novembre 1992, près de 900 000 personnes se sont reliées au réseau. On estime aussi que 35 % des utilisateurs de Prodigy travaillent ou exploitent une entreprise à la maison (Stewart, 1994). Au Canada, le quart des familles possède au moins un micro-ordinateur (Statistiques Canada, dans Nichols, 1994). Actuellement, il est possible de réaliser les opérations suivantes sans quitter le clavier : acheter un billet d’avion, commander le livre qu’on lira en voyage, acheter la brosse à dents et le pyjama dont on aura besoin, faire venir le logiciel qui nous permettra de dresser notre itinéraire à destination, et en profiter pour faire livrer des fleurs à la personne avec laquelle on correspond depuis un certain temps et que l’on part rencontrer. Vous l’aurez deviné : on peut même trouver l’âme soeur sur Internet ! Nous vivons bel et bien dans l’ère de l’information. Malheureusement, il n’y a pas beaucoup de gens qui en sont conscients, et surtout, qui sont conscients des enjeux impliqués. En effet, un sondage canadien réalisé par la firme Gallup au mois de mars dernier révèle que 62 % des gens sont tout simplement indifférents à l’autoroute électronique (Le Soleil, 1994). Cela survient dans une période où il n’est plus possible d’écouter un bulletin de nouvelles ou de lire un journal local sans entendre parler de l’autoroute de l’information. Le moins que l’on puisse dire, donc, c’est qu’il existe un problème majeur. Pour une majorité de personnes, l’informatique c’est bien, mais c’est surtout pour le voisin. Le problème est encore plus sérieux lorsqu’on considère que pour les pays déjà informatisés, les futurs utilisateurs de l’autoroute électronique arrivent en gare avec des attitudes et des comportements bien ancrés. Depuis 1983, alors que les entreprises se sont mises à acheter massivement des micro-ordinateurs, l’utilisation du papier a augmenté de 51 % – 51 % de « tonnes » de papier ! On estime également que chaque année, les gestionnaires perdent six « semaines » à retrouver de l’information mal classée (Tetzeli, 1994). Les enjeux sont importants, en particulier parce que le marché du travail subit une transformation...

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