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Le partenariat éducation-travail pour qui ? Claude LAFLAMME Université de Sherbrooke Introduction Même si les propos que nous tenons n’ont aucune prétention scientifique, ils n’en proviennent pas moins d’une longue expérience de recherche menée, depuis près d’une quinzaine d’années, sur l’insertion professionnelle des jeunes Québécois. Cette démarche a commencé par l’analyse des fonctions du système d’enseignement dans une société capitaliste et la situation du marché du travail dans les années 1970 (Bengle et Laflamme, 1979). La réflexion tentait de montrer l’inévitable rupture entre le système d’enseignement et le système de la production en raison de leurs fonctions respectives. Dans la continuité de cette analyse, notre exposé tentera de démontrer dans quelle mesure une certaine réflexion sociologique sur le partenariat éducation-travail opère, à bien des égards, un détournement de la construction d’un objet d’étude. Autrement dit, définir un objet d’étude à partir du postulat de partenariat, c’est déjà «afficher ses couleurs» en faveur d’une composante de la relation, c’est-à-dire celle du travail et, plus précisément, celle de l’entreprise au détriment de la formation. Comme le souligne Tanguy (1986), cet objet d’étude s’est largement constitué à partir de la demande sociale et non d’une démarche théorique ou méthodologique. Plus précisément, si le patronat et l’État sont les principaux instigateurs, le système d’enseignement est souvent à la remorque de cette demande. 4.1 214 Claude LAFLAMME Il fut un temps, pas très lointain, où afficher son parti pris pour l’entreprise dans la construction d’un objet d’étude disqualifiait, ou rendait même illégitime la recherche. Ou bien la sociologie aspirait à une plus grande objectivité, ce qui, aux yeux de certains, la rendait plus insidieuse, ou bien elle prenait parti pour les défavorisés (en termes marxistes : les exploités) et devenait critique, c’est-à-dire, aux yeux d’autres,«dénonciatoire ». Quoi qu’il en soit, nous étions en présence de deux types de recherche sociale, l’une régulationniste (presque toujours fonctionnaliste) et l’autre marxiste (axée sur le changement) qui s’affrontaient dans un rapport de confrontation ou de complémentarité. De cet affrontement, tant dans la définition de l’objet d’étude que dans l’examen et l’analyse de la réalité, surgissait une connaissance peut-être plus éclairante. Depuis le début de la crise économique, on a l’impression d’assister au développement d’une sociologie uniforme et, peut-être, «ronronnante ». Par exemple, la définition de la formation des jeunes et des adultes doit émaner de la bonne entente entre le système d’enseignement et le système de production. Il ne semble exister aucune contradiction entre les principes de la formation et les principes de la production. Les modèles allemands et suédois de formation en alternance deviennent les exemples à suivre et les études et analyses de la situation québécoise doivent s’inscrire dans la logique du «comment faire disparaître les obstacles à l’implantation de ces modèles» ou au mieux du «comment trouver les moyens d’adapter ces modèles à la réalité québécoise ». La présentation de ces modèles masque à la fois les réalités de ces pays et celles du Québec. En effet, il suffit de lire les études de Maurice (1979, 1984) et les analyses de Tanguy (1982a, 1982b) pour constater que ces modèles s’inscrivent dans l’histoire, la culture et l’économie de ces pays. On oublie souvent que les jeunes, Allemands ont probablement la plus longue scolarité au monde. À la scolarité obligatoire à plein temps de neuf ou dix ans, il faut ajouter deux ou trois années de scolarité obligatoire à temps partiel (dix-huit ans) et très souvent deux ou trois années de Kindergarten (quatre-cinq ans). La culture de la formation est intégrée à l’ensemble de la société. La forte participation des employeurs allemands dans le système d’enseignement s’inscrit, entre autres, dans la conscience des risques sociaux que peut produire la marginalisation par le chômage d’une partie importante de la jeunesse (Newton et al., 1992). Ainsi, la valorisation de l’éducation et du partenariat s’inscrit...

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