Pouvoir, leadership et autorité dans les organisations

Introduction

Introduction Le pouvoir et son exercice sont sources de beaucoup de controverses et les sentiments à leur endroit se révèlent souvent très équivoques. Le pouvoir suscite tantôt la peur, tantôt l’attrait, tantôt le mépris, tantôt l’admiration. C’est un sujet que toutes et tous connaissent pour l’avoir subi et pour l’avoir exercé. Pourtant, c’est aussi un sujet mal connu. Les perceptions que les gens s’en font sont habituellement composées d’une mixture d’opinions, d’idées, de préjugés, d’idéaux, de craintes, de fantasmes, de symboles. Rares sont les personnes qui en ont une représentation claire et sereine. Les attitudes à l’endroit du pouvoir sont souvent marquées par le paradoxe. Si d’un côté les aspirations à la puissance sont réprimées, de l’autre côté les réactions d’impuissance sont méprisées. Confusion, préjugés, hantise, magnétisme sont autant de réactions qui cohabitent lorsqu’il est question du pouvoir. Un mal à éviter pour plusieurs, le pouvoir est néanmoins omniprésent dans les rapports humains. Cet état de tension et cette atmosphère de méfiance font de l’exercice du pouvoir dans les organisations un sujet difficile à traiter. Non seulement est-il délicat, mais il couvre une réalité très complexe où se manifeste toute la gamme des comportements humains. Le titre du volume illustre d’ailleurs cette complexité : il faut faire appel à plusieurs vocables pour réussir à couvrir convenablement les divers aspects des rapports d’influence entre les humains. Au hasard de leurs interactions, les humains sont continuellement appelés à s’influencer de toutes sortes de façons, conscientes comme inconscientes, et pour toutes sortes de raisons, bonnes ou mauvaises. Les rapports de pouvoir sont au coeur des relations XIV Introduction humaines ; Bertrand Russell (1938) suggère même qu’ils en constituent une forme d’énergie de base. Toutefois, dans la culture occidentale, on a eu tendance à nier la réalité du pouvoir. D’une certaine façon, on a tenté d’aseptiser les relations humaines de leurs composantes de pouvoir en arguant que des relations saines et enrichissantes ne peuvent se développer et se maintenir que si les rapports de pouvoir sont neutralisés ; comme si le fait de ne pas les voir les faisait disparaître ! Il n’est pas rare de rencontrer des personnes qui entretiennent la croyance, devenue une sorte de mythe, que le pouvoir dans les rapports humains est quelque chose de fondamentalement dangereux, qu’il est l’apanage des esprits diaboliques, qu’il ne peut que générer le mal et que son élimination ne pourrait être que salutaire. Ainsi, en plus d’avoir fait du pouvoir une sorte de tabou, on lui a aussi accolé un préjugé très défavorable. On l’a ramené, dans certains cas, à une sorte de malédiction dont les porteurs sont à éviter. Dans l’imagerie populaire, le pouvoir est d’ailleurs facilement associé à la cruauté, à la violence, à l’exploitation de l’humain par l’humain, à la manipulation, à la corruption. Il faut dire que les actes de violence et d’abus rapportés par les médias et qui sont commis par des personnages en quête de puissance n’ont rien pour anoblir le sujet. Ce malaise à l’endroit de la question du pouvoir s’est également traduit par une fragmentation et un cloisonnement des concepts qui y sont reliés. L’influence, l’autorité, le leadership sont autant de concepts qui ont été présentés en pièces détachées, ayant peu de liens entre eux et parfois même décrits comme des réalités antagonistes. Certains affirment que le leadership serait plus noble que l’autorité, d’autres jugent que l’influence serait un mode de relation plus acceptable que le pouvoir, d’autres encore prétendent que le leadership serait une façon d’influencer sans avoir de pouvoir... Mais ces pirouettes intellectuelles ne renseignent guère sur la nature véritable du pouvoir. On reste avec des jugements sommaires et des raisonnements fragiles qui fournissent rarement une compréhension nuancée des mécanismes à l’œuvre entre des acteurs qui s’influencent. Dans ce volume, nous proposons une façon d’aborder les rapports de pouvoir dans les organisations qui devrait permettre d’en acquérir une compréhension plus claire, plus nuanc...