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PRÉFACE La Constitution de la Ve République française aura cinquante ans en octobre prochain: étonnante longévité pour un pays renommé pour la multiplicité de ses expériences constitutionnelles! Cette longévité a certes été assortie de multiples révisions du texte originel : on en compte d’ores et déjà une vingtaine, et une réforme d’ensemble doit être engagée en 2008, à la suite du rappor t présenté le 27 octobre 2007 par le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le r ééquilibrage des institutions de la Ve République, présidé par Édouard Balladur. Néanmoins, l’équilibre réalisé en 1958 – équilibre subtil au point qu’il est bien difficile, comme le rappelle Antonin-Xavier Fournier, de classer le régime par référence aux catégories classiques (s’agit-il d’un «régime parlementaire à correctif présidentiel», d’un «régime parlementaire semi-dualiste» ou encore d’un «régime parlementaire à gouvernement semi-présidentiel»?) – a été, pour l ’essentiel, maintenu. Au moment où, en France même, sont en voie d’être édités plusieurs ouvrages collectifs dressant un bilan de l’évolution des institutions, on ne peut que se féliciter qu ’une réflexion comparable ait été engagée au Québec: un regard extérieur permet toujours de mettre en évidence certains aspects qui échappent à ceux qui sont immergés dans la réalité qu’ils s’efforcent d’analyser. Sans doute l’ouvrage ne porte-t-il que sur les phases dites de « cohabitation », marquées, au-delà des frictions et tensions récurrentes suscitées par le bicéphalisme de l’Exécutif, par la coexistence d’un président de la République et d’un gouvernement de tendances politiques opposées. L ’hypothèse avait été envisagée pendant pr ès d’une trentaine d’années comme purement VIII La dynamique du pouvoir sous la Ve République théorique (le mot même de « cohabitation» n’avait d’ailleurs pas cours), les institutions de la Ve République étant considérées comme incapables de survivre à une telle év entualité; et, pourtant, la France a connu trois périodes de ce type (1986-1987, 1993-1995, 1997-2002), couvrant au total une dizaine d’années, sans que le séisme annoncé se soit pr oduit. Ces périodes doivent être considérées comme des moments clés de l ’histoire politique récente de la France: elles ont en effet été des phases cr uciales de mise à l ’épreuve des institutions, dévoilant des dimensions qui avaient jusqu’alors été ignorées ou sous-estimées. Chacune de ces cohabitations a présenté des caractéristiques singulières, comme le note l’auteur: la première a été d’autant plus conflictuelle qu’elle mettait aux prises deux futurs candidats à l ’élection présidentielle et qu’on s’aventurait sur des terres inconnues, puisqu’il s’agissait de fixer les règles d’un jeu nouveau; plus paisible, la seconde s ’est pourtant également doublée de tensions, cette fois au sein de la majorité parlementair e; la troisième, enfin, s’inscrivant dans un contexte d ’affaiblissement de l’autorité présidentielle consécutive à l’échec de la dissolution, sera ex ceptionnellement longue et donnera au premier ministre une puissance inédite. Cependant, par-delà ces différences non négligeables, tenant aussi aux orientations politiques et aux personnalités respectives des protagonistes, se profilent un ensemble d’éléments communs qui permettent de spécifier le contexte de cohabitation : légitimités concurrentes du président et du gouvernement, qui s’appuient sur des majorités différentes; déplacement des pouv oirs au profit du premier ministre, notamment dans le domaine de la politique intérieure; interprétation large donnée par le président de la République de ses prérogatives constitutionnelles , notamment en matière de politique étrangère et de défense ou en tant que président du conseil des ministr es, et utilisation d’un pouvoir critique vis-à-vis du gouvernement. Les phases de cohabitation ont bien été marquées par un déplacement sensible des équilibr es de pouvoir, au moins entre les deux pôles de l ’Exécutif, la position du P arlement n’ayant pas été substantiellement modifiée. À première vue, l’étude semble ne présenter...

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