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C h a p i t r e III LA COHABITATION, QUELLES CONSÉQUENCES SUR LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE? 3.1. LA COHABITATION, DES RÉPERCUSSIONS IMPORTANTES SUR LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE Le phénomène de la cohabitation, on l ’a vu, affecte le fonctionnement des institutions et la pratique politique sous la Ve République. Face à ce bouleversement , la société française n ’est évidemment pas r estée indifférente. D’abord, la cohabitation a provoqué un débat important entre les divers spécialistes qui réfléchissent sur l’évolution du régime politique de la F rance1. Dans cette perspective, un grand nombr e de politologues2 n’hésitent pas à conclure que la cohabitation est une pathologie de laVe République qui remet 1. Georges Vedel, loc. cit., p. 35. 2. Parmi les partisans de cette option nous retrouvons des spécialistes chevronnés tels: le conseiller d’État Jean Massot, le doyen Georges Vedel, l’ancien directeur de Cabinet du premier ministre Lionel Jospin, Olivier Schrameck, Didier Maus, Jean-Marie Denquin, Philippe Lauvaux ainsi qu’Édouard Balladur et Valéry Giscard d’Estaing pour ne nommer que ceux-là. 92 La dynamique du pouvoir sous la Ve République en cause le présidentialisme majoritaire et la stabilité gouvernementale qui en découle3. Ce courant majoritaire prétend que la réforme constitutionnelle de 2000, qui a instauré le quinquennat, est susceptible de neutraliser durablement le phénomène et de favoriser le retour à une pratique « normale» des institutions4 . Par ailleurs, et même si ce courant n’est pas majoritaire, d’autres spécialistes voient en la cohabitation des vertus bien évidentes5. Une telle situation , loin d’entraîner un blocage généralisé des institutions, provoquerait plutôt une période relativement productive au niveau des r éformes et obligerait le président et le premier ministre à faire des compromis qui feraient évoluer la France6. L’opinion publique, quant à elle, se montre plutôt favorable au phénom ène7. Après une brève période de questionnements et de scepticisme, les Français, après trois cohabitations, jugent l’expérience plutôt fructueuse8. Les sondages laissent même croire qu’une majorité de la population appr écie le phénomène au point de v oir en cette pratique une façon de modifier durablement le fonctionnement des institutions9. Si le retour au parlementarisme pratiqué sous la IIIe et la IV e République semble peu souhaitable pour les spécialistes et la classe politique, la population française, elle, n ’a pas une opinion aussi tranchée, ce que pr ouve la ferveur cohabitationniste10. En ce sens, il semble y avoir sur le sujet, comme sur la question européenne d’ailleurs, une division profonde entre l’élite et la population. 3.1.1. LA COHABITATION, UN PHÉNOMÈNE NUISIBLE ET IMPRODUCTIF? Selon le Doyen Georges Vedel, la cohabitation r eprésente une pratique pernicieuse pour les institutions de la Ve République11. Dans un tel contexte, le fonctionnement des pouvoirs publics est altéré et l’architecture du régime est modifiée de sorte que les affrontements se font plus nombreux, fragilisant 3. Georges Vedel, «Variations et cohabitation», Pouvoirs, no 83 (1997), p. 120. 4. Georges Vedel, «Le quinquennat contre les risques de cohabitation », Cahiers français, no 300 (2001), p. 36. 5. Entre autres, François Luchaire, Marie-Anne Cohendet et d’une manière plus nuancée Jean-Claude Zarka, Maurice Duverger et Guy Carcassonne. 6. François Luchaire, «Les vertus de la cohabitation », Cahiers français, no 300 (2001), p. 30. 7. Olivier Duhamel, «La cohabitation institutionnalisée», in Sofres: L’état de l’opinion 1999, Paris, Seuil, 1999, p. 73. 8. Gérard Grunberg, «Du cohabitationnisme de l ’opinion», Pouvoirs, no 91 (1999), p. 90. 9. Olivier Duhamel, op. cit., p. 81. 10. Gérard Grunberg, loc. cit., p. 90. 11. Georges Vedel, loc. cit., p. 35. [3.21.97.61] Project MUSE (2024-04-26 15:57 GMT) Chapitre III − La cohabitation, quelles conséquences sur la société française ? 93 ainsi le régime12. Même si les institutions fonctionnent, elles évoluent, durant la cohabitation, à un r ythme irrégulier, ce qui n’est pas souhaitable13. La cohabitation est donc un phénomène nuisible qui se caractérise par un affaissement possible de l’autorité présidentielle, par une crise de légitimité et...

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