In lieu of an abstract, here is a brief excerpt of the content:

C H A P I T R E DEUX 2 À la conquête d’un territoire de recherche en art Enjeux épistémologiques M o n i k B r u n e a u e t S o p h i a L . B u r n s Tout individu possède des ressources minimales d’innovation capables de répondre à des besoins d’adaptation, d’évolution ou d’expression. Il faut néanmoins reconnaître que la connaissance n’est pas innée, pas plus, d’ailleurs, rappelle Gauthier (2000), que l’aptitude à la recherche, qui s’acquiert par le travail. Si la recherche systématique mène au savoir, 22 Traiter de recherche création en art elle n’en constitue pas la seule source de connaissances. Il existe donc plusieurs accès à la connaissance, mais toutes les connaissances n’ont pas la même légitimité. Ce que commente Gingras (2000a): Nos façons d’«apprendre» dépendent de notre personnalité et correspondent aux types de rapports que nous entretenons avec la réalité. À l’échelle sociale, l’espace occupé par chacune des sources de connaissance permet de caractériser des personnes et des collectivités: on appelle «traditionnelles» certaines sociét és précisément parce qu’elles s’appuient sur les traditions et on dit, à tort ou à raison, des poètes qu’ils sont plutôt intuitifs, des financiers qu’ils sont plutôt rationnels, des personnalités politiques de premier plan qu’elles doivent leur succès à leur expérience . Postulons dès le départ qu’aucune de ces sources n’est«meilleure» qu’une autre puisque chacune permet de connaître une partie de la réalité, ne serait-ce qu’imparfaitement (p. 21). Il faut bien reconnaître que la recherche systématique, qu’elle se pratique dans le cadre de programmes d’études avancées ou de programmes de recherche indépendants, ne constitue pas le seul mode d’accès à la connaissance et il importe de le crier haut et fort. Là n’est pas notre intention. Par ailleurs, la recherche systématique, telle qu’elle se pratique à la maîtrise ou au doctorat, se démarque autant par le type de connaissances visées que par la manière d’y avoir accès. Ainsi, le mémoire ou la thèse de doctorat se profile avec le style du chercheur, l’état des connaissances, disponibles dans différents domaines, sa manière d’y accéder, de traiter ces informations et de les «faire parler». C’est ce qui crée la différence et définit les niveaux de connaissances. 2.1. LES CHEMINS DE LA CONNAISSANCE Pour l’étudiant, s’inscrire dans un processus de recherche systématique n’est pas naturel, et l’exercice peut sembler encore plus périlleux pour celui qui revient aux études après une longue période sur le marché du travail, là où la pratique est valorisée et le savoir, estimé en fonction des résultats. Pour le praticien, pour l’artiste notamment, les connaissances acquises dans le milieu professionnel viennent d’autorités intellectuelles ou artistiques qui ont assuré le maintien d’une tradition ou maintenu pendant une certaine période un courant d’expression plus à la «mode». Cette autorité exerce un certain «pouvoir» sur la communauté et sur le jugement de l’individu tout en apportant, dans certains cas, une «valeur ajoutée» à sa production. C’est ainsi que pour plusieurs disciplines artistiques le travail avec un «maître» représente un passage obligé qui garantit la valeur de sa formation, ce «maître» ayant la reconnaissance [3.141.244.201] Project MUSE (2024-04-26 13:04 GMT) À la conquête d’un territoire de recherche en art: enjeux épistémologiques 23 de ses pairs à une échelle nationale ou internationale. Il y a dans cette prise de relais de pratiques ou valeurs traditionnelles une crédibilité qui s’appuie plus sur la confiance que sur des faits prouvant leur efficacité, véracité ou pertinence. Ce type de connaissances résiste au doute et, en cela, assure le relais entre les générations sans que l’on en interroge les fondements. Personne ne songe à remettre en question le bien-fondé de l’entraînement en danse classique, qui remonte au XIXe siècle, ni en musique tant la tradition s’est implantée dans l’imaginaire collectif des praticiens. Le...

Share