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C H A P I T R E 2 2 L’INTERVENTION COMMUNAUTAIRE D’AUJOURD’HUI ET LA CONCILIATION ENTRE PROFESSIONNALISME ET MILITANTISME Christian Jetté Université de Montréal christian.jette@umontreal.ca Les réflexions livrées dans ce texte concernant la recherche d’une nouvelle articulation entre les dimensions professionnelles et militantes du travail en intervention communautaire sont le fruit d’un travail d’une quinzaine d’années dans les milieux de la pratique et les milieux de la recherche en action communautaire. Dans la première partie de ce texte, nous décomposerons en deux dimensions fondamentales la pratique de l’intervention communautaire – dimension militante et dimension professionnelle – et nous en expliciterons les diverses composantes afin de mieux comprendre leur imbrication dans la pratique. Cette première section sera suivie d’une description et d’une analyse de certaines des caractéristiques du métier d’intervenant communautaire au Québec. Nous nous arrêterons brièvement sur certaines phases du développement de l’intervention communautaire afin de voir comment se sont articulées les dimensions professionnelles et militantes de cette pratique au fil du temps. Par la suite, dans les sections 3 et 4, nous aborderons la question du renouvellement des pratiques d’intervention communautaire dans le contexte des années 2000 marquées, d’une part, par l’émergence de nouvelles incertitudes sociales, environnementales et économiques et, d’autre part, par la montée des individualismes. Nous tenterons de 340 L’organisation communautaire – fondements, approches et champs de pratique démontrer que cette conjoncture peu favorable – du moins en apparence – aux solidarités collectives peut être le lieu d’un renouvellement des pratiques d’intervention communautaire si l’on tient compte des nouvelles formes de solidarité qui apparaissent au sein des communautés de même que des principes défendus par les nouvelles générations d’intervenants communautaires. Pour terminer, nous tracerons le profil des compétences nécessaires aux nouveaux intervenants qui investissent l’action communautaire. Mais pour le moment, entamons la première partie du menu proposé en définissant les deux visages de l’intervention communautaire : le militantisme et le professionnalisme. 22.1. MILITANTISME ET PROFESSIONNALISME : LES DEUX VISAGES DE L’INTERVENTION COMMUNAUTAIRE Le travail des intervenants en action communautaire a considérablement évolué au cours des trente dernières années. Cette évolution s’est manifestée de diverses manières : évolution des problématiques, émergence de nouveaux acteurs sociaux, émergence de nouveaux lieux de pratique, transformations des politiques publiques, etc. Mais une chose est demeurée constante tout au long de cette période : c’est la volonté clairement exprimée par les intervenants de l’action communautaires, qu’ils soient du secteur public ou des milieux communautaires, de favoriser l’empowerment (ou le pouvoir d’agir) des personnes et des communautés avec qui ils sont appelés à travailler. Cette volonté de travailler « avec » les personnes et les communautés tout au long du processus d’intervention est un trait distinctif de l’action communautaire. Cette pratique ne repose pas uniquement sur des principes vertueux voulant qu’il soit généreux ou politiquement rentable de faire participer les gens aux processus décisionnels qui les concernent, mais aussi sur des résultats de recherche qui démontrent que les personnes et les communautés disposant d’un certain pouvoir sur leur destinée jouissent d’une meilleure santé physique et mentale et sont davantage en mesure de faire face aux aléas de la vie (Paquet, 2005 ; DNSP, 2005). La question de l’autonomie des personnes et des communautés est donc au cœur des objectifs visés par l’action communautaire. Mais ce processus d’acquisition d’autonomie par les personnes et les communautés est complexe. En effet, requiert de la part de l’intervenant un savoir-faire important lié à certaines habiletés techniques telles que l’analyse des situations problématiques, la mobilisation des personnes et des groupes, l’animation de rencontres et d’assemblées, la mise en place de moyens d’action originaux et efficaces, la gestion de ressources financières et humaines, etc. C’est là l’aspect qu’on pourrait qualifier de «professionnel » de la tâche d’un intervenant communautaire. Certes, ce savoir-faire ne fait pas l’objet d’une codification stricte au sens où l’entend le code des professions, c’est-à-dire que le titre d’intervenant communautaire (ou d’organisateur communautaire...

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