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Chapitre 10 : Programmes d'éducation cognitive pour jeunes ayant un TDAH et des difficultés d'apprentissage1
- Presses de l'Université du Québec
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10 C H A P I T R E PROGRAMMES D’ÉDUCATION COGNITIVE POUR JEUNES AYANT UN TDAH ET DES DIFFICULTÉS D’APPRENTISSAGE1 Fredi P. BÜCHEL, Université de Genève RÉSUMÉ La première partie de cet article présente une courte introduction dans la théorie (métacognitive) et la pratique de l’éducation cognitive. Celle-ci a été définie comme une approche systématique de transmission des outils du fonctionnement intellectuel. Il s’agit donc d’une médiation de la reconstruction individuelle des outils culturels de l’apprentissage et de la pensée, par une réflexion et une restructuration d’expériences personnelles. Cette reconstruction exige un acte de décentration de la part 1. Pour le support éditorial de cet article, je remercie Hedwige Büchel-Vallon, responsable pédagogique au Collège international de Lancy, Genève, et Nadine Kipfer, collaboratrice scientifique à la Faculté de psychologie et des sciences de l’éducation de l’Universit é de Genève. Nadine a, de plus, contribué à la présentation du programme de Cornoldi et al. (1996). 160 Trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité de l’apprenant. Celui-ci résout non seulement un problème, il observe aussi son propre processus de résolution. C’est la réflexion sur son propre fonctionnement cognitif et conatif par rapport à un problème qui constitue l’essentiel d’une approche métacognitive. La deuxième partie commence par une description générale des programmes cognitifs-métacognitifs appliqués dans le domaine du TDAH. Elle est suivie par une discussion de quatre critères qui devraient être pris en compte dans la construction et l’application d’un programme d’éducation cognitive. L’article se termine par une description et une discussion assez détaillées de trois programmes d’éducation cognitive destinés à des enfants et adolescents ayant un TDAH : le programme de Cornoldi et al. (1996) pour l’application individuelle avec des enfants de 6 à 14 ans ; le programme de Lauth et Schlottke pour l’application en groupe avec des enfants de 7 à 12 ans avec un programme parallèle pour les parents ; le programme d’intervention métacognitive individuelle de l’Atelier d’apprentissage pour enfants et adolescents ayant des difficultés d’apprentissage sans ou avec TDAH. 1. DE L’EXPÉRIENCE D’APPRENTISSAGE MÉDIATISÉE (EAM) À L’ÉDUCATION COGNITIVE En 1980, j’ai participé à un premier atelier sur l’évaluation dynamique avec la batterie LPAD (Learning Potential Assessment Device ; Feuerstein, Rand et Hoffman, 1979) que j’ai complétée plus tard par une introduction à l’Enrichissement Instrumental (PEI ; Feuerstein et al., 1980). À cette période, on ne parlait pas encore d’éducation cognitive. Tout l’intérêt était centré sur l’approche de Feuerstein. Pour ceux dont la formation scienti- fique et professionnelle était dominée par le behaviorisme ou par l’ancienne psychologie allemande, le message de Feuerstein était fascinant. Ses idées n’étaient pas vraiment nouvelles et il n’était pas non plus le seul à proposer une éducation systématique du raisonnement et de l’apprentissage2 , mais il était le premier à l’avoir prononcé explicitement et avec 2. Déjà Binet (1911) a rappelé qu’il faut non seulement mesurer l’intelligence, mais aussi l’éduquer (voir Büchel et Paour, 1990). [3.239.149.56] Project MUSE (2024-03-29 12:38 GMT) Programmes d’éducation cognitive pour jeunes ayant un TDAH 161 conviction: que la modifiabilité cognitive représente un élément constituant du développement humain, que l’étiologie d’une déficience ne détermine pas le futur développement d’un enfant, mais qu’il faut prendre en consid ération l’expérience d’apprentissage médiatisée (EAM), que l’intelligence humaine est mal évaluée par les tests QI standardisés et qu’il faut les remplacer ou au moins les compléter par des méthodes plus interactives et plus dynamiques, que diagnostic et intervention forment un ensemble au lieu d’être séparés l’un de l’autre et même être confiés à des professions différentes, à savoir le diagnostic aux psychologues et l’intervention aux éducateurs ou aux thérapeutes. Je pourrais allonger la liste des idées qui ont animé de vives discussions en ce temps-là. Pourtant, certains parmi nous ont vite réalisé que cette approche, aussi fascinante soit-elle, manquait de fondement...