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Avant-propos Depuis une vingtaine d’années, l’université est redevenue un enjeu important dans le contexte des multiples tentatives de redéfinir ses missions fondamentales. De nouvelles tensions entre la recherche, l’enseignement et le marché ont vu le jour. Le déclin des investissements gouvernementaux a forcé les universités à se tourner vers le secteur privé pour financer tant la recherche que certains programmes de formation. En outre, une population étudiante plus diversifiée et moins homogène dans ses parcours et ses expériences, l’émergence du chercheur-entrepreneur et la multiplication des centres de recherche en milieu universitaire sont autant de phénomènes qui modifient profondément la dynamique universitaire. Le modèle de l’université moderne, proposé par Humboldt au début du xixe siècle, est ainsi remis en cause et d’aucuns veulent ajouter l’innovation et la valorisation économique aux missions d’enseignement, de recherche et de service à la collectivité qui définissent depuis longtemps les missions premières des universités. Ces diverses transformations ont donné lieu à des discours critiques, déplorant sur un ton inspiré tantôt «Le naufrage de l’université», tantôt sa ruine. Imaginant une «institution» mythique qui, depuis le Moyen Âge, aurait été au service du savoir désintéressé, ces polémiques entourant la mission de l’université sont rarement fondées sur une analyse posée de l’histoire réelle de cette institution presque millénaire. Or, comme les textes réunis ici le montrent amplement, l’université a subi, tout au long de son histoire, de nombreuses mutations et transformations qui ont affecté plus ou moins profondément sa structure, ses agents, sa mission, ses systèmes de représentation, son interaction avec la société et ses rapports avec le pouvoir. VIII Avant-propos Loin d’adopter une conception essentialiste de l’université, cet ouvrage veut faire ressortir, par un questionnement transversal et sur la longue durée, les ruptures profondes qui ont jalonné l’histoire des universit és du Moyen Âge à nos jours, en Europe comme en Amérique, tout en révélant les invariants sur les plans institutionnel et structurel. Loin d’avoir été une «tour d’ivoire» déconnectée de la vie sociale, les universit és ont toujours été partie prenante du milieu dans lequel elles se sont implantées. Comme tout champ relativement autonome, elles forment un«espace ouvert, contraint de puiser au dehors les ressources nécessaires à [son] fonctionnement», et sont exposées «de ce fait à devenir le lieu de la rencontre entre séries causales indépendantes qui fait l’événement, c’est-à-dire l’historique par excellence». Les textes proposés ici explorent les différents agents de transformation, externes et internes, et leurs interactions qui ont amené l’université à s’adapter sinon à se redéfinir maintes fois au cours des siècles. Les multiples réformes (proposées, tentées et parfois réussies) ont, au cours des siècles, touché toutes les facettes de la vie universitaire: les liens avec l’État et l’Église, les modes de gestion internes de l’institution, l’organisation et le contenu des études, le contrôle de la vie étudiante. Le développement industriel fera pour sa part apparaître de nouveaux acteurs avec lesquels les universités vont apprendre à collaborer en développant de nouveaux programmes d’enseignement et des liens des plus étroits entre recherche et industrie dans les secteurs où cela est possible et même nécessaire, comme le génie et les sciences physiques et biomédicales. Les grades aussi ont souvent été des enjeux comme le montrent les nombreux débats entourant la convention de Bologne qui vise à uniformiser les grades européens sous la trilogie licence-master-doctorat (LMD). Les universités, du Moyen Âge à nos jours, ont leurs historiens qui ont balisé de nombreuses pistes d’enquête depuis les trente dernières années. Les contributions réunies ici se situent résolument dans le prolongement des travaux les plus récents, tant dans le domaine de l’histoire des universités anciennes, modernes que contemporaines. De nombreux travaux ont été consacrés aux causes et aux effets des transformations des champs universitaires de plusieurs pays (notamment la France, les ÉtatsUnis , l’Angleterre et l’Australie) au cours des dix dernières années, mais bon nombre d’entre eux visent soit à faire de l’université ancienne un modèle imaginaire...

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