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Introduction Interdépendance, enchevêtrement culturel et interférence identitaire Clivages et réinventions du sujet collectif Pierre-W. Boudreault Université du Québec à Chicoutimi 1. INTERDÉPENDANCE GLOBALE ET IDENTITÉ:LE DILEMME Au sujet de l’Europe communautaire en crise constitutionnelle, Wanda Dressler pose, à point nommé, une question centrale. À la suite de recherches europ éennes nombreuses, elle constate le dilemme entre «l’instauration de sociétés pluriculturelles démocratiques, le brassage interculturel comme norme et les enjeux politiques majeurs liés à la globalisation de l’économie mondiale». Situation complexe, mais surtout situation qui remet le dilemme entre le demos et l’ethnos à l’avant-scène des beaux risques du politique dans le processus d’interdépendance qui introduit à la post-modernité. La nation entendue comme «modèle de territorialité politique incontournable à dominante civique et ethnique [et] niveau de régulation du pouvoir et de redistribution solidariste» est mise à mal par le mouvement d’autonomisation plus ou moins poussé de leurs structures régionales, sous l’impulsion de la politique des fonds structurels de Bruxelles qui a donné une voix consultative aux régions, et du Conseil de l’Europe qui a placé la défense des cultures régionales comme une des valeurs essentielles de la construction européenne. A-t-on affaire à ce qui constitue, en référence à la pensée de Norbert Elias, à une « force centrifuge » dans la genèse des grands ensembles supranationaux , écho pas si lointain du processus de pacification et d’organisation des groupes et des forces traditionnelles en lutte à l’intérieur des États-nations qui débouchèrent à la «curialisation» et, par conséquent, à l’institutionnalisation d’un système public de redistribution par la centralisation des impôts. Cependant, avec le «brassage interculturel» sur des espaces humains plus vastes s’ajoute l’enchevêtrement des champs politico-juridiques qui délimitaient ce qui était l’apanage des nations dans le processus de régulation et de redistribution des richesses collectives. Plusieurs modes de réalisation politico-institutionnelle de la nation existent donc aujourd’hui dans les pays d’Europe dont la différence notable justifie la reprise de la réflexion sur l’ancienne distinction entre nation-ethnique et nationcivique et sur le rôle du concept d’ethnie en raison de son opérativité sociale pour construire des entités collectives nouvelles. […] Un peu partout, le décalage apparaît de plus en plus net entre un discours idéologique prônant l’ouverture et le dialogue des cultures et le développement sans précédent de formes structurelles d’exclusion qui semble connaître un nouvel essor depuis le 11 septembre 2001 avec les politiques sécuritaires mises en place dans de nombreux pays démocratiques (Dressler).«Pallier les déficits identitaires devenus phénomènes de masse, en raison de l’extension des relations économiques de marchandises et des formes nouvelles de prolétarisation du travail des migrants marqués par l’isolement et le déracinement, devient un défi pour toutes les entités politiques d’Est en Ouest». L’interférence entre demos et ethnos nécessite une action politique d’autant que, dans les flux de migrations intenses liés à l’ouverture des fronti ères, a été «déclenché un processus de redifférenciation» par les laissés sans terre, ou ce qui est pareil, les déterritorialisés. Et l’auteure est très explicite: Le développement des conflits interethniques et d’agressivité raciale nécessite le contrôle étatique des affects et des déplacements de la figure de l’étranger comme si le «eux/nous» ethnique traçait une frontière verticale plus radicale que celle horizontale de classe. Après avoir brossé un tableau général pour l’ensemble des pays européens, Wanda Dressler propose une réflexion éclairante sur la définition pragmatique des concepts qui fondent la relation entre l’espace, l’ethnicit é, la nation, la culture, l’identité et le politique. Les dangers d’ethnocratie et d’enfermement identitaire trouvent leur actualité dans la relation entre le passé récent et l’accroissement des enchevêtrements culturels stimulés par l’interdépendance des économies mondiales. Dans la crise des repères, à la suite des mobilités des biens et des personnes , renaissent «les mythes de l’origine de l’humanité où être humain, c’est vivre entre la terre, la nature, le matériel et le ciel, inaccessible et...

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