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CHAPITRE 10 L’espace d’action des mouvements dits antimondialisation Le transnational, la Palestine, la banlieue Brigitte Beauzamy CADIS/GTMS Les mobilisations proprement transnationales du type contre-sommet nous fournissent un idéal-type de la mobilisation à distance dans la sphère dite antimondialisation , qui peut éclaircir les rapports entretenus par ces mouvements avec le territoire dans lequel ils agissent. Nous y trouvons mise en action l’injonction double avec laquelle opère la sphère dite antimondialisation :d’une part, la réalisation de mobilisations d’ampleur internationale rassemblant des mouvements d’origines nationales multiples; d’autre part, une réflexion politique pensée d’emblée à deux niveau, «penser global, agir local». Nous étudierons les propriétés de l’espace d’action des mobilisations dites antimondialisation à partir de la problématique de la distance:l’hypoth èse défendue ici est qu’une spécificité de cette sphère antimondialisation est son rapport à l’espace, que nous allons aborder sous l’angle de la dynamique des mobilisations, c’est-à-dire en gardant à l’esprit les aspects temporels de la réalisation de ces actions de lutte. À partir de ces représentations de l’espace des mobilisations transnationales, nous établirons que les mouvements de la sphère dite antimondialisation agissent dans un espace d’action mondialisé. En comparant l’action de ces mouvements en Palestine et dans les banlieues françaises, nous établirons que l’espace dans lequel agissent les militants des mouvements non institutionnels est un espace dans lequel ils agissent directement. Ce n’est donc pas strictement la distance physique qui détermine les potentialités d’un engagement de terrain par définition «local», mais une certaine propriété de cette distance, qui permet ou empêche, selon les cas, la mise en place d’actions de lutte. Néanmoins, agir à distance nécessite de nouer des liens avec des relais locaux; la nature et l’action de ceuxci se trouvent réciproquement modifiées par les relations qu’ils entretiennent avec d’autres organisations. L’exemple de l’action en banlieue illustre le travail réalisé par certaines organisations pour s’imposer comme relais indispensables à une action locale; mais la présence de représentations propres aux sphères militantes antimondialisation gêne la réalisation de cette opération symbolique dans un contexte qui s’y prête mal. 1. MOBILISATIONS TRANSNATIONALES: LA COMPRESSION DE L’ESPACE COMME SIGNE DISTINCTIF DES MOBILISATIONS ANTIMONDIALISATION 1.1. Un mode d’action central de la sphère dite antimondialisation La partie la plus immédiatement perceptible des mobilisations dites antimondialisation est composée d’événements transnationaux dans la mesure où ils rassemblent des militants de différentes nationalités:dans cette catégorie peuvent être rangés les contre-sommets et les Forums sociaux – mondiaux ou régionaux, comme le FSE. Ces mobilisations transnationales sous forme de manifestations de masse et de vastes «forums» sont la première image qui se présente quand on pense aux mobilisations désormais nommées«altermondialistes»1, et elles constituent un point de référence obligé pour définir les frontières mêmes d’une sphère antimondialisation aux contours flous. Le « mouvement des mouvements » tend à se présenter – et à se représenter – comme une opposition mondiale à la mondialisation néolib érale, et cette caractéristique est traduite dans la diversité des origines géographiques des mouvements concernés. Le caractère international des rencontres antimondialisation constitue un des éléments de surface des représentations de la sphère militante:il se traduit par l’évocation du nombre de nationalités et la juxtaposition dans l’image de groupes porteurs de traits exotiques – ainsi les religieuses africaines jouant du tam-tam dans le documentaire Un mondo diverso è possibile. Dans les rencontres antimondialisation 194 Génies des lieux 1. Aujourd’hui, une partie des militants de cette sphère choisissent de se nommer altermondialistes , et cette dénomination a connu un tel succès qu’elle a supplanté celle d’antimondialisation. Cependant, comme une part importante de mon terrain a été effectuée avec des militants qui ne choisissent pas de se dénommer – en français – altermondialistes, mais anticapitalistes, j’ai choisi de dénommer l’ensemble composé des deux tendances, qui composent une seule sphère,«antimondialisation». Il s’agit d’un construit de recherche analytique. [18.117.137.64] Project MUSE (2024-04-25 16:37 GMT) s’entremêlent une idéologie...

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