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C H A P I T R E 4 LA GESTION DE L’EAU EN CHINE Une analyse institutionnelle Bertrand Meinier La Chine est confrontée à une grave pénurie d’eau qui menace son développement et son environnement. Jusqu’à présent, l’approche choisie par les autorités chinoises pour traiter ce problème de pénurie reposait sur le développement des infrastructures hydrauliques, selon une approche de gestion de l’offre. Dans les régions les plus arides du pays, la construction de ces infrastructures a permis d’accroître le volume d’eau disponible pour chaque usager. Néanmoins, une telle approche ne cible pas les véritables causes de la pénurie. Malgré des contraintes physiques déterminantes, la pénurie d’eau en Chine relève avant tout des pratiques non durables des usagers de cette ressource (Nickum, 1998). Tant en milieu rural qu’en milieu urbain, cette ressource est polluée et gaspillée. La résolution de la pénurie passe donc inévitablement par le changement des modes de consommation des utilisateurs de la ressource. 76 L’éveil du dragon L’expérience démontre qu’en matière de gestion de l’eau les problèmes ne relèvent souvent pas d’incapacités techniques, mais bien de problèmes d’ordre organisationnel et culturel. Fondamentalement, le problème réside dans la façon de coordonner les utilisations de tous les usagers d’une ressource afin d’obtenir un niveau de consommation optimal (Meinier, 2002). En fait, il s’avère possible de créer des arrangements institutionnels pour supporter la coordination des activités d’un groupe d’individus et inciter ces derniers à coopérer dans le but de réaliser un objectif commun (Ostrom, 1990). Dès lors, se pose la question de savoir comment s’organise, institutionnellement , la gestion de l’eau en Chine. L’objectif de ce chapitre consiste donc à déterminer le rôle que jouent les institutions dans ce processus de gestion. Une première section résume les principales causes et conséquences de la pénurie d’eau en Chine. Ensuite, il s’agit d’examiner la nature des arrangements institutionnels mis en œuvre pour résoudre cette crise, puis d’évaluer la performance même de ces institutions. Enfin, il convient d’étudier les différentes contraintes et opportunités liées à la modernisation du régime de gestion de l’eau en Chine. 1. LA PÉNURIE D’EAU EN CHINE En Chine, la région la plus durement touchée par la pénurie d’eau est formée des bassins versants du Huang He, du Huai et du Hai (ci-après bassin des 3-H) (fig. 4.1). Or, près du tiers de la population chinoise vit dans ces bassins qui recouvrent presque l’ensemble des territoires des provinces du Hebei, du Shanxi, du Shaanxi, du Ningxia, du Gansu, du Henan et du Shandong ainsi que les municipalités autonomes de Beijing et Tianjin. À peine 10 % des ressources totales en eau du pays s’écoulent dans ces trois bassins hydrographiques (Banque mondiale, 2001a). La Banque mondiale (2001b) estime à 37 milliards de m3 le déficit hydrique dans la région des 3-H. La disponibilité d’eau moyenne par habitant dans cette région est évaluée à 750 m3 par année, soit 250 m3 en dessous du seuil de pénurie établi par la Food and Agriculture Oganization (FAO) (Hong et Zehnder, 2001). Les origines de la pénurie sont multiples. Tout d’abord, contrairement au sud du pays, la plaine de Chine du Nord n’est arrosée que par un très faible volume de précipitations. Dans cette région, les précipitations annuelles varient entre 400 et 800 mm (Lasserre, 2002). Dans le bassin du Huang He, la rareté de l’eau est aussi exacerbée par l’importante charge sédimentaire de ce fleuve, près du tiers du volume du Huang He étant nécessaire pour transporter les sédiments en provenance du plateau du Loess (plateau de l’Ordos) jusqu’à la mer de Bohai (Tsering, 2002). Paradoxalement, malgré ces contraintes physiques déterminantes, l’utilisation faite de l’eau dans cette région demeure pour le moins peu économe. D’importants gaspillages [18.216.32.116] Project MUSE (2024-04-24 09:35 GMT) La gestion de l’eau en Chine 77 surviennent dans tous les...

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