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© 2005 – Presses de l’Université du Québec CHAPITRE LES TRANSFERTS D’EAU EN IRAN COMMENT EXPORTER EN PÉRIODE DE SÉCHERESSE ? 17 Frédéric Lasserre1 Le premier projet d’exportation d’eau de l’Iran vers le Koweït est né en 1993 : l’Iran envisageait à l’époque de transférer 750 000 m3 d’eau par jour au Koweït. Les autorités iraniennes nient qu’il y ait eu accord à cette époque. Un autre projet prévoyait la vente de 430 000 m3 par jour au Qatar, grâce à un aqueduc longeant la côte du golfe sur 550 km, avant de traverser le golfe sur un segment de 210 km pour rejoindre le Qatar. La compagnie allemande Lahmeyer avait été abordée pour ces deux chantiers, qui ont finalement été abandonnés. Une étude similaire envisageait l’exportation depuis la rivière Karoun vers les villes côtières de l’Arabie saoudite et Riyad. 1. Je remercie Mohsen Saberian, étudiant au doctorat à l’Université Laval, pour son aide dans la recherche nécessaire pour la rédaction de ce chapitre. © 2005 – Presses de l’Université du Québec 384 Les transferts massifs d’eau De nouvelles négociations ont débuté entre Iran et Koweït en 20002, et une entente a été paraphée le 13 décembre 2003, confirmée par un contrat formel signé le 23 janvier 2004. Le projet est imposant: entre 1,5 et 2,5 milliards de $ d’investissements, et des retombées financières importantes mais non divulguées pour l’Iran. On peut cependant s’étonner du projet iranien, dans un contexte de rareté croissante de l’eau sur son territoire, rareté imputable à une croissance démographique rapide et à une sécheresse récurrente depuis plusieurs années. Certes, le Khouzistan fait figure, en Iran, de province où l’eau abonde, mais la région souffre elle aussi de difficultés de gestion de la ressource. De plus, des opposants à la vente d’eau au Koweït avancent que cette eau serait plus utile pour les Iraniens que pour les étrangers. L’annonce du projet a provoqué une vive colère parmi les habitants de certaines régions qui s’estiment lésés par la politique de transferts intérieurs d’eau, une politique appliquée par Téhéran depuis de nombreuses années. Ce transfert vers le Koweït était-il un bon choix pour le gouvernement iranien ? La forte priorité accordée par celui-ci aux transferts massifs d’eau comme outil de gestion de l’eau est-elle viable ? Correspond-elle à un réel besoin, ou sert-elle de paravent à la satisfaction d’autres intérêts ? 1. UN PROJET D’EXPORTATION, OUTIL D’UNE DIPLOMATIE RÉGIONALE? 1.1. L’IRAN, PAYS OÙ L’EAU ABONDE Le projet conclu entre l’Iran et le Koweït prévoit le transfert de 865 000 m3 d’eau par jour depuis la rivière Karkheh, affluent du Tigre. Le prix de l’eau vendue au Koweït n’est pas encore déterminé, selon les comptes rendus de presse, ce qui paraît étonnant. Il semble cependant que ce prix variera en fonction de la disponibilité de la ressource : l’Iran se serait réservé le droit de modifier le contrat en fonction des éventuelles périodes de sécheresse. L’aqueduc vers le Koweït serait construit par Gulf Utilities Company , une filiale de Utilities Co., une entreprise britannique. Le coût total de la construction se situe entre 2 et 2,5 milliards $. D’une longueur de 540 km, l’aqueduc aurait un diamètre de 2,7 m sous le sol, et de 1,4 m sous la mer. De cette longueur, 330 km passeraient en territoire iranien et achemineraient 10 m3/sec (315 millions m3 par an) de la rivière Karkheh, depuis le barrage de Karkheh (Khouzistan) jusqu’à Abadan, sur la côte 2. Iran News, 28 novembre 2003, . [3.16.15.149] Project MUSE (2024-04-26 17:44 GMT) Les transferts d’eau en Iran 385© 2005 – Presses de l’Université du Québec du golfe ; 210 km de conduits passeraient ensuite sous la mer jusqu’à Al Zur, une île koweïtienne (figure 17.1)3. En 2001, le porte-parole de Gulf Utilities estimait que l’aqueduc pourrait être achevé en 20054. Confronté à une grave sécheresse, le Kowe...

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