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© 2005 – Presses de l’Université du Québec CHAPITRE LES PROJETS ÉGYPTIENS DE TRANSFERTS HORS DU BASSIN DU NIL TOSHKA ET LE CANAL DE LA PAIX 16 Annabelle Boutet et Frédéric Lasserre Les princes de Tanis sont devenus stupides, et ceux de Memphis se font des illusions. Ce sont eux, les chefs des provinces, qui égarent l’Égypte ! Ésaïe 19 :13. La situation hydraulique de l’Égypte actuelle présente un certain nombre de constantes depuis les années 1970 et la fin de la construction du HautBarrage d’Assouan. La première d’entre elles est la structure des ressources qui repose sur les 55,5 milliards de m3 annuels inscrits dans le traité signé avec le Soudan en 19591, ce qui représente environ 95 % des ressources annuelles. Les 5 % résiduels sont couverts par les précipitations en bordure de la Méditerranée, l’exploitation des eaux souterraines présentes par endroits, les quelques unités de dessalement et enfin le développement des capacités de recyclage des eaux usées. Ce qui, jusqu’au milieu des années 1990, donnait une image de « relative abondance » de la situation générale de l’Égypte. Une autre constante est la piètre qualité des 1. Accord entre la République du Soudan et la République arabe unie pour la pleine utilisation des eaux du Nil du 8 novembre 1959. © 2005 – Presses de l’Université du Québec 350 Les transferts massifs d’eau réseaux d’approvisionnement et de drainage, tant du point de vue agricole que du point de vue urbain. Enfin, la détérioration et la disparition de terres agricoles dans la vallée et le delta du Nil hypothèquent les efforts menés, depuis des décennies, en faveur de l’expansion2. Dans la configuration de la demande, les constantes sont également présentes ; ainsi, les usages agricoles représentent environ 90 % alors que la consommation urbaine et domestique se diversifie en termes notamment de service et de qualité3. Depuis lors, le spectre de la pénurie, associé aux exigences du libéralisme économique et du développement durable, ont amené le gouvernement égyptien à repenser sa politique de gestion de l’eau et notamment à y intégrer des paramètres tels que la tarification de l’eau, la rationalisation des services et des modalités de répartition des ressources4. Après la tentative de Gamal Abd Al-Nasser de faire fleurir le désert occidental dans les années 1970 et du président Anouar Al-Sadat de faire pousser des villes nouvelles, le président Moubarak a lancé, à partir de 1990, une politique ambitieuse de mise en valeur du territoire. Cette politique repose sur la bonification de terres désertiques, grâce à l’exploitation d’aquifères fossiles et à la canalisation, sur de grandes distances, des eaux du Nil. Moyennant des avantages financiers, elle invite la population de la vallée du Nil, à venir coloniser des villes nouvelles en plein désert. Le gouvernement prévoit ainsi de mettre en valeur, à court terme, 80 000 ha de terres agricoles près d’Oweinat, 250 000 ha dans le nord du Sinaï grâce aux eaux du Nil canalisées par le canal Al-Salam (Northern Sinai Agricultural Development Program, NSADP) ; 100 000 ha autour de trois oasis (Farafra, Dakhla, Kharga), et 200 000 ha près de Toshka (programme South Egypt Development Project, ou Nouvelle vallée) dans le désert de l’Ouest5. Dans le cadre de ce chapitre, nous porterons notre attention principalement sur les projets couramment appelés Canal de la paix – Canal Al-Salam dans le nord du Sinaï – et plus récemment le projet Toshka – qui s’intègre dans le vaste National Project for the Development of Upper Egypt (NPDUE). 2. Annabelle Boutet (1999). La question de l’eau au Proche-Orient. Des politiques publiques pour la nécessité. Le cas de l’Égypte, thèse de doctorat en science politique, Aix-enProvence , janvier. 3. Annabelle Boutet, op. cit. 4. Annabelle Boutet (2001). L’Égypte et le Nil. Pour une nouvelle lecture de la question de l’eau, Paris, L’Harmattan. 5. Emma Young (1999). « Just a Mirage ? », New Scientist, 18 décembre. [3.144.187.103] Project MUSE (2024-04-19 10:48 GMT) Les projets égyptiens de transferts hors du bassin du Nil 351© 2005 – Presses de l’Universit...

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