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Fondements
- Presses de l'Université du Québec
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FONDEMENTS LA CONNAISSANCE SCIENTIFIQUE Nature de la connaissance scientifique La connaissance et le savoir scientifiques se distinguent des autres savoirs ou autres types de connaissance, tout comme la science, en tant que mode de pensée, de discours et d’action, se distingue des autres activités humaines. Plusieurs critères de distinction peuvent être mentionnés, dont aucun ne suffit à lui seul. La connaissance scientifique doit d’abord être empirique, émaner de phénomènes sensibles, se rapporter à une réalité tangible, objective et observable, être confirmée par répétition. La démarche de connaissance doit être systématique, foncièrement désintéressée1 (notamment quant à ses retombées), critique, et elle s’appuie généralement sur le principe du déterminisme 1. Nous admettons les recherches dites « commanditées », « appliquées »,« orientées », même si le chercheur a un intéressement quelconque (notamment monétaire, peut-être via son employeur) dans l’objet de la recherche, comme c’est le cas de la recherche pharmaceutique en compagnie. Le critère de désintéressement mentionné est formel et s’adresse à la démarche de recherche, laquelle ne devrait pas être influencée, ni dans ses modalités ni dans la diffusion de ses résultats, par des intérêts autres que de connaissance. 2 Abrégé sur les méthodes de recherche et la recherche expérimentale (strict ou statistique). Enfin, la science étant du domaine public, l’expérience de connaissance et ses contenus principaux doivent pouvoir être exhaustivement décrits, communiqués et reproduits. En fait, ce que l’on entend et que l’on admet comme« explication scientifique » de la nature et de ses phénomènes tient à une idéologie implicite et assez contraignante. Cette idéologie peut se traduire en quelques principes épistémologiques, couramment et tacitement acceptés par les chercheurs. Les voici, accompagn és d’une définition sommaire : • Le rationalisme : « Rien de ce qui existe ne trouve une explication qui soit étrangère à ce que la raison humaine peut accepter » (Le Petit Larousse). • Le matérialisme: «Rien n’existe en dehors de la matière, et que l’esprit est lui-même entièrement matériel» (Le Petit Larousse). Tout est matériel : les phénomènes, les causes, les effets. Cela ne revient pas à dire que la logique ou les processus mentaux sont bannis ou qu’ils n’existent pas. • L’empirisme : la connaissance doit procéder de l’expérience, à l’exclusion des idées ou systèmes a priori ou des doctrines autoritaires. Essentiellement, les données de la science viennent des sens. • Le déterminisme : chaque phénomène, chaque variation observ ée dans la nature est attribuable à l’action d’une cause ou d’un ensemble fini de causes. Le déterminisme strict, affirmation du règne universel du principe de causalité (mécanique), est consacré comme principe d’explication notamment dans les œuvres de Pierre Simon de Laplace (1749-1827). Ce dogme a été plus ou moins abandonné dans l’épistémologie scientifique moderne, depuis les années 1950, au profit d’une version assouplie, le déterminisme statistique. Le déterminisme statistique affirme encore la primauté du principe de causalité mais il accorde sa juste place à la complexité et au hasard. On peut le formuler comme suit : « Chaque phénomène, chaque variation observée est attribuable à l’action probable de certains [54.86.180.90] Project MUSE (2024-03-29 10:59 GMT) Fondements 3 facteurs principaux en plus d’une fluctuation aléatoire plus ou moins grande, qu’on espère réduire mais qu’il est impossible d’annuler ». Les modèles d’explication proposés dans les sciences humaines (sociologie, psychologie, etc.), certains modèles en biologie , les phénomènes stochastiques (économie, démographie, météorologie, etc.), s’y retrouvent mieux dans cet accommodement du principe de causalité. • La cohérence : L’explication d’un phénomène doit tenir compte des conceptions et théories admises dans le domaine. • La parcimonie : Un modèle explicatif, une théorie qui met en jeu un nombre de causes réduit est préférable, plus « vraie », plus scientifique que celle ayant un nombre de causes plus élevé. • La falsifiabilité (ou testabilité) : Un modèle explicatif, une théorie, un test ne sont admissibles que si on peut...