Les églises du Québec: Un patrimoine à réinventer

5. Un avenir pour ce patrimoine

© 2005 – Presses de l’Université du Québec Édifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Sainte-Foy, Québec G1V 2M2 • Tél. : (418) 657-4399 – www.puq.ca Tiré de : Les églises du Québec, Luc Noppen et Lucie K. Morisset, ISBN 2-7605-1355-6 • D1355N Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés 5 Un avenir pour ce patrimoine L’église devient en effet le centre commun de tous les cultes comme des assemblées civiques. On y célèbre aussi bien le culte théophilanthropique de La Révellère-Lépeaux que les fêtes de la Jeunesse, des Vieillards ou des époux. Le dimanche, le curé en reprend possession. Dans certaines régions, l’église sert aux catholiques, aux protestants et aux juifs1 . C’était la situation en... 1795. L’État français des lendemains de la Révolution avait alors confié l’usage des églises aux communes, qui pouvaient s’en servir «pour les assemblées ordonnées par la loi pour l’exercice du culte, sous réserve que ses ministres aient fait acte de soumission aux lois»; cette législation, précise l’archiviste Jacques Levron, «sauv[a] les églises2». 268 LES ÉGLISES DU QUÉBEC, UN PATRIMOINE À RÉINVENTER© 2005 – Presses de l’Université du Québec Édifice Le Delta I, 2875, boul. Laurier, bureau 450, Sainte-Foy, Québec G1V 2M2 • Tél. : (418) 657-4399 – www.puq.ca Tiré de : Les églises du Québec, Luc Noppen et Lucie K. Morisset, ISBN 2-7605-1355-6 • D1355N Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation réservés 1. P Jacques Levron, dans Michel de Saint-Pierre, 1973,p.20. 2. P Jacques Levron, dans Michel de Saint-Pierre, 1973,p.20. 3. P Thomas Coomans, 2003. 4. P L’épisode est rapporté par Levron, dans Michel de Saint-Pierre, 1973,p.41. 5. M Yvan Christ, 1947. 6. O Carole Duffréchau, 2002 (6 décembre). L’abandon, la réaffectation ou la disparition d’églises ne sont pas, nous l’avons exposé, chose nouvelle. Thomas Coomans, en Belgique, a fait état de cette habitude séculaire qui tend à l’universalité3 , et dont la France remporte sans doute la palme. Le classement in extremis du clocher et d’un transept de l’église Saint-Jacques, à Montréal, y connaît d’ailleurs un précédent notable: plusieurs décennies plus tôt, à Montchauvet, la municipalité avait en effet entrepris de dynamiter l’église romane Sainte-Madeleine jusqu’à ce qu’un soulèvement apparemment national cautionne la sauvegarde de ses restes4 . De Barrès à Saint-Pierre, en passant par Yvan Christ5 , de nombreux auteurs ont recensé et déploré pareilles «pertes» à celles qui faisaient , au Québec, frémir Gustave Baudouin: l’église abbatiale de la Trinité, à Vendôme, reconvertie au début du xxe siècle en vespasiennes (mixtes, de surcroît), ou l’abbaye de Fontenay, transformée en usine papetière au lendemain de la Révolution, montrent pourtant que la désaffectation cultuelle ne provoque pas nécessairement la désaffection culturelle. Fontenay, en effet, est inscrite depuis 1981 sur la Liste des sites du patrimoine mondial de l’UNESCO, tout comme le sont, d’ailleurs, le Mont Saint-Michel (qui un temps servit de prison) et plus d’une centaine d’anciens lieux de culte dans le monde. D’où vient, alors, cet étonnement étalé dans le journal français Le Point devant «des histoires qui appartiennent au Québec», où une journaliste apprenait que 100 à 150 églises montréalaises seraient mises en vente, de 2002 à 2008, et réaménagées en vue d’un usage laïc ?«Musées d’art ou bibliothèques, passentencore.Maislorsqued’anciens édifices religieux sont reconvertis en écoles de danse ou divisés en appartements, même les plus hérétiques sourcillent6», écrivait-elle. Les nombreux cas européens prouvent pourtant à l’inverse, comme l’a montr é Coomans, qu’il a historiquement été beaucoup plus usuel de démolir des églises, faute d’usage ou des fonds nécessaires à l’entretien des Montréal. L’ancienne Presbyterian Church dite Scotch Church ou Gabriel Street Church. En 1792, c’est la premi ère église protestante construite à Montréal. Elle était située au coin sud-est du Champ-deMars . Elle a été acquise par le gouvernement provincial en 1886 et utilisée comme entrepôt jusqu...