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CHAPITRE 4 MOUVEMENTS URBAINS ET DÉMOCRATISATION DES POLITIQUES URBAINES DANS LE CONTEXTE DE LA MONDIALISATION Pierre Hamel Marco Silvestro À Montréal, l’action des mouvements urbains a joué un rôle de premier plan dans la modernisation de l’administration municipale, y inclus celui d’une démocratisation de la gestion publique, notamment en ce qui concerne la planification et les politiques urbaines. Dès les années 1960, ces acteurs ont attiré l’attention des médias, de la population et des pouvoirs publics sur le caractère rétrograde de la gestion effectuée à la ville de Montréal, dénonçant l’absence de transparence des décisions prises par les autorités municipales, notamment en matière de rénovation urbaine, et réclamant une participation des citoyens à sa gestion. Ces demandes et les mobilisations qui les ont portées ont conduit à transformer la culture civique urbaine. Elles n’ont pas pour autant démocratisé l’ensemble de la gestion municipale. C’est pourquoi, à partir 92 Mouvements sociaux et changements institutionnels du milieu des années 1980, les Corporations de développement économique communautaire (CDEC) se sont engagées sur le terrain du développement économique local. En associant les CDEC aux mouvements urbains, nous voulons éclairer la portée de leur action par rapport aux objectifs de démocratisation que formulaient les mouvements urbains des années 1960 et 1970. Pouvons-nous dire qu’elles parviennent à renouveler l’action collective de ces mouvements sur le terrain de la démocratie locale ? En acceptant d’établir des partenariats avec les pouvoirs publics, les milieux d’affaires et les syndicats réussissent-elles à préserver leur autonomie ? Comment interpréter leur action qui se déploie au sein des institutions ? Afin de répondre à ces questions, nous considérons l’évolution de l’action des CDEC dans le contexte urbain de Montréal en tenant compte des défis que représentent les changements récents sur le plan de leur financement. Avant de traiter de cet enjeu, il était nécessaire de dégager les principales caractéristiques de ces groupes, de leur évolution et du contexte politico-institutionnel à l’intérieur duquel s’inscrit leur action. Au préalable, nous situons l’action des CDEC en fonction d’un enjeu théorique majeur dans la conjoncture, celui de l’institutionnalisation de l’action collective. 4.1. DÉVELOPPEMENT LOCAL ET ENJEUX INSTITUTIONNELS DE L’ACTION COLLECTIVE À l’instar des autres mouvements sociaux, les mouvements urbains ne suivent pas un chemin tracé d’avance ou n’empruntent pas un cycle prévisible. Cela tient à la nature de l’action collective et à l’interaction qui prévaut entre facteurs internes et facteurs externes en ce qui a trait à la portée ou à l’impact de ces mouvements par rapport au changement social. Mais cela s’explique aussi par le fait que le changement social luim ême demeure difficile à évaluer. En outre, l’accroissement des ressources disponibles de même que l’émergence de nouvelles structures d’opportunité politique, qui peuvent éclairer après coup les conditions favorables à la mobilisation, relèvent de transformations économiques, sociales et politiques que les mouvements sociaux peuvent, certes, contribuer à produire, mais dont ils ne sont pas les seuls, voire les premiers responsables. Enfin, la nature même de l’action collective, son caractère ambivalent et souvent ambigu, caract éristique des mouvements sociaux contemporains (Hamel et Maheu, 2001), accroît l’incertitude pour les acteurs et alimente des stratégies individuelles et collectives difficiles à anticiper. [3.136.18.48] Project MUSE (2024-04-26 02:14 GMT) Mouvements urbains et démocratisation des politiques urbaines 93 En faisant appel à l’exemple de Montréal et en remontant au début des années 1960, on peut dire que personne n’avait entrevu la portée exacte des mouvements urbains tant par rapport à la démocratie locale qu’en ce qui concerne la démocratisation de la gestion publique. Ainsi, alors que plusieurs chercheurs soulignaient la faiblesse, sinon la disparition de ces mouvements dans de nombreux pays (Ceccarelli, 1982), au Québec et en particulier à Montréal, les acteurs de ces mouvements ont relancé leur action à partir des enjeux du développement urbain et local. C’est ce qui a donné lieu à la création des CDEC au milieu des années 1980. Même si les CDEC ne constituent qu’une forme organisationnelle particulière que...

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