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LE DÉVELOPPEMENT SOCIAL DES COMMUNAUTÉS L’EXPÉRIENCE QUÉBÉCOISE ET NORD-AMÉRICAINE Louis Favreau et Lucie Fréchette1 Ce texte présente l’expérience de développement social de communautés locales au Québec. Cette expérience, très nord-américaine, a l’avantage d’avoir été fortement innovatrice au cours de son histoire pour avoir réalisé une cohabitation active entre le secteur associatif, les initiatives de la nouvelle économie sociale et les services publics de proximité dans plusieurs domaines (santé et services sociaux, éducation populaire, emploi et insertion, développement local et régional). Après avoir décrit cet itinéraire sur plus de 40 ans (1960-2004), nous aborderons directement les fondements et les lignes de force de cette organisation des communaut és qui s’appuie aujourd’hui sur un nouveau « métier » que des milliers de personnes exercent tant dans les services publics que dans le secteur associatif. 1. MOUVEMENTS SOCIAUX ET ORGANISATION COMMUNAUTAIRE AU QUÉBEC : ITINÉRAIRE D’UNE PRATIQUE SOCIALE DEVENUE UNE PROFESSION (1960-2004) 1.1. Les années 1960 : le « local » résiduel et l’émergence de contre-pouvoirs dans les communautés La naissance de comités de citoyens (associations de quartier) est concomitante à celle d’un nouveau métier du « social », le travail social communautaire . À la fin des années 1960, l’organisation communautaire s’introduit 1. Louis Favreau est sociologue, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en développement des collectivités (CRDC) à l’UQO, conseiller au GESQ et coordonnateur du réseau CRCP. Lucie Fréchette est psychologue communautaire, coordonnatrice du CÉRIS à l’UQO et membre de l’équipe canadienne du réseau CRCP. Ce texte s’inscrit dans le cadre du programme de recherche CRCP. 294 Le Sud… et le Nord dans la mondialisation notamment dans la formation universitaire en travail social, dans les pratiques et les nouveaux services créés par le mouvement associatif (cliniques populaires de santé, etc.). Mais cette montée en puissance de l’organisation communautaire au sein de la profession de travailleur social pendant cette décennie n’aura pas été sans tensions, notamment la tension entre deux fonctions, la fonction d’intervention d’aide dans l’urgence et celle, très distincte, de l’intervention de développement (Doucet et Favreau, 1997). Avec les années 1960, l’organisation communautaire fait donc son entrée en scène, en devenant par la suite partie intégrante du service public, notamment dans les Centres locaux de services communautaires (CLSC). Mais elle aura surtout favorisé l’émergence de contre-pouvoirs au plan local parce que les pouvoirs publics considéraient alors le local comme résiduel. 1.2. Années 1970 : la montée de l’associatif dans l’organisation des communautés et la percée du « local » alternatif Au cours des années 1970, une minorité de professionnels du social travaillant pour des ONG s’engagent dans un travail de soutien à des associations de locataires, à des organismes de défense de personnes bénéficiant de l’aide sociale et à des groupes de défense des chômeurs… Dans un premier temps, ils ont les yeux rivés sur l’organisation communautaire américaine (Alinsky, 1976). Dans un second temps, ils trouvent leur inspiration dans l’approche de conscientisation latino-américaine (Freire, 1974). Le contexte de la période est celui d’un État-providence en expansion et d’un État québécois en voie de devenir peut-être un État national : mouvements sociaux à l’offensive, en synergie les uns avec les autres, mouvement associatif et étudiant, syndical et national réunis. Pendant cette période, celle du local alternatif, un mouvement associatif autonome fait peu à peu sa niche dans nombre de quartiers populaires à côté du service public de proximité (les CLSC). [13.59.236.219] Project MUSE (2024-04-24 14:08 GMT) Initiatives économiques populaires et développement des communautés au Nord 295 1.3. Les années 1980 : l’introduction de l’associatif (le communautaire) dans l’espace public Les années 1980 prennent une toute autre allure. Contestée à droite par le courant conservateur qui évoque le spectre de la crise financière, le service public est également critiqué à gauche par les milieux associatifs et alternatifs pour la faiblesse de son organisation démocratique. Le service public, qui se voulait universel, est en réalité un type particulier de r...

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