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De l'économie du savoir à l'économie intelligente Quelques réflexions sur la nouveauté en économie Daniel Latouche CE QU'IL Y A DE NOUVEAU DANS LA « NOUVELLE ÉCONOMIE » 1 L'acharnement que certains économistes mettent à démontrer que la soi-disant« nouvelle économie » n'existe pas ou que cette économie n'a rien de bien nouveau est suspect. Pourquoi donc une telle passion à nier l'évidence ? La « nouvelle économie » existe, la preuve c'est qu'elle est malade ! La question de l'existence ou non d'une « économie nouvelle » n'est guère intéressante en soi ; ce qui l'est par contre est de tenter de comprendre comment elle fonctionne ou encore comment elle pourrait fonctionner. De la même manière, le débat sur l'existence ou non du sexe des anges n'a pas d'utilité en soi - sauf pour les anges évidemment -; par contre, déterminer comment « cela » pourrait« marcher » si... Comme dans tout phénomène de nouveauté, « l'économie nouvelle » s'appuie sur des changements importants, visibles, paradoxaux parfois et qui laissent souvent perplexes. C'est le cas de ces monnaies qui semblent toujours trop fortes ou trop faibles et qui ne reflètent plus les « conditions fondamentales » - les fameuses« fundamentals » chères aux ministres des Finances. Et que dire de ces taux de chômage et d'inflation qui ont vu leur relation traditionnelle sévèrement 1. Ce texte emprunte à la fois à la communication présentée au colloque La nouvelle économie : où, quoi, comment de l'Association d'économie politique et du Centre interuniversitaire de recherche sur la science et la technologie tenu à Montréal les 17 et 18 octobre 2002 et à une étude rédigée pour le Secrétariat de l'autoroute de l'information. Voir Tous les savoirs du monde: l'inforoute et l'emploi dans la nouvelle économie, Québec, Secrétariat de l'autoroute de l'information, 1997. 28 La nouvelle économie perturbée. Mais en même temps, les éléments de continuité avec « l'économie ancienne » sont suffisamment présents pour permettre d'identifier ce qui change et ce qui ne change pas. Ainsi, il semble qu'il y ait toujours des gagnants et des perdants, que les cycles ne soient pas vraiment disparus et que le travail demeure la loi d'airain de notre vie en société. Certains « échecs » de la science économique (et des autres disciplines) se portent plutôt bien, retrouvant constamment une nouvelle jeunesse. Par exemple, l'ancienne comme la nouvelle économie semblent également désemparées devant le trou noir du développement que constitue l'Afrique. Que la science économique et surtout certains de ses praticiens résistent à reconnaître les faits n'a rien de bien surprenant. Toutes les disciplines scientifiques et même les productions intellectuelles et artistiques connaissent périodiquement ces querelles entre les « vrais » et les « nouveaux ». Il faudra d'ailleurs un jour trouver les points d'ancrage commun entre le « nouveau roman », la « nouvelle vague », la« nouvelle histoire », les « nouveaux philosophes » et la « nouvelle économie »2 . À quel moment la nouveauté surgit-elle ? Est-elle annonciatrice d'un paradigm shift ou plus simplement d'un retour en force de l'orthodoxie ? Faut-il voir dans ces proclamations de nouveauté la simple affirmation d'une installation à demeure dans une modernité dont on soupçonne qu'elle est là pour durer ou, au contraire, le signe d'une rupture profonde et d'un dépassement dans la post-modernité ? Pourquoi certaines disciplines apparaissent-elles comme plus « disciplinées » et semblent-elles capables de contrôler les discours de nouveauté ? Il y a bien une nouvelle criminalité, mais pas de « nouvelle criminologie ». Le droit, l'anthropologie, la démographie et même la science politique semblent réfractaires à proclamer leur nouveauté. Il arrive même que la nouveauté disparaisse du vocabulaire. C'est le cas des NTIC, les Nouvelles technologies de l'information et de la communication, devenues depuis peu de simples TIC. Mais tous ces discours sur la nouveauté des uns et des autres font bien pâle figure devant ceux qui concernent plus spécifiquement l'économie. Ce qui frappe d'abord - surtout vu de l'extérieur - c'est l'ampleur d'un phénomène qui atteint d'abord les outils disciplinaires et académiques (la science économique). On a en effet l'impression que ce sont surtout les explications proposées par les économistes qui ont changé, davantage que...

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