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LA STRATÉGIE NATIONALE DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ La recomposition des processus de pauvreté et d’exclusion dans des périodes d’importante croissance économique porte tant le gouvernement québécois que les organismes de la société civile à repenser les méthodes et les stratégies de lutte contre la pauvreté et l’exclusion. Le fait d’allier pauvreté et exclusion traduit un renforcement de perspective plutôt qu’une superposition de deux modèles, puisqu’il s’agit de deux phénomènes qui se distinguent tout en se complétant et en se relayant. Par exemple, dans le projet de loi 112 – ou Loi visant à lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale – le gouvernement du Québec définit la pauvreté comme étant «la condition dans laquelle se trouve un être humain qui est privé de manière durable des ressources, des moyens, des choix et du pouvoir nécessaires pour acquérir et maintenir son autonomie économique et favoriser son inclusion active dans la société québécoise1». Cette définition large et surtout l’idée de «condition» ont certes l’avantage d’attirer l’attention sur les effets de la pauvreté, mais laissent dans l’ombre les processus, les dynamiques, les facteurs, de même que les variantes et les constantes du phénomène. C’est en effet ici que prend forme une notion aussi multidimensionnelle que celle d’exclusion2 . Celle-ci permet de rendre compte du fait que les gens qui souffrent de privations économiques ou qui ont un revenu faible sont souvent les mêmes à ne pas être en emploi, à vivre dans les quartiers et 6 C H A P I T R E 1. Gouvernement du Québec (2002). Projet de loi no 112, ch. I, art. 2. 2. Plusieurs gouvernements européens (France, Grande-Bretagne, Irlande, Belgique) ont fait de l’exclusion un mot clé de leur politique publique. Il n’est donc pas de notre intention d’aborder les débats sur l’utilité et la validité de la notion d’exclusion dans les études sur la pauvreté, non plus que sur son caractère opératoire pour les politiques publiques d’intervention sur la pauvreté. 188 CITOYENNETÉ ET PAUVRETÉ les maisons insalubres, dans des structures familiales fragiles et à être dépourvus de l’accès aux systèmes de médiations sociales et à des réseaux de relations sociales intenses; ce sont enfin les mêmes dont les enfants sont les plus exposés aux éléments pathogènes (violence, drogue, prostitution) et fréquentent les écoles les plus défavorisées3 . Les personnes pauvres sont, quoique à des degrés différents, exclues physiquement et socialement des avantages et disponibilités qu’offre la société de l’emploi et du salariat: revenu, emploi, consommation, engagement communautaire ou social, participation politique, etc. Glennerster soutient que l’élargissement de la pauvreté à la notion d’«exclusion sociale» permet de prendre en considération l’incapacité des gens à participer à des activités de la vie ordinaire tout en permettant d’élaborer d’autres indicateurs et d’autres mesures relatives à leur manque d’accès aux services publics, au transport, au travail et aux soins sociaux4 . Il conclut que l’exclusion sociale n’est pas qu’un concept académique beaucoup plus performatif que celui de pauvreté; elle exige une réponse globale de la part du gouvernement et des initiatives d’intervention interministérielles5 . On dirait que si l’exclusion ne change ni l’ampleur ni la nature du problème de pauvreté, elle en modifie la compréhension et justifie la mise en œuvre de politiques publiques intégrées et globales. Lutter à la fois contre la pauvreté et l’exclusion ne saurait concerner seulement les privations économiques et la réduction des écarts dans les revenus, mais bien la restauration de l’égalité de droit et de la citoyenneté sous l’égide de la solidarité sociale et de la justice sociale, exigence fondamentale de la démocratie, impératif notoire et inhérent à ce que traduit l’idée de vivre en société ou l’être-ensemble. LA PAUVRETÉ ET L’EXCLUSION: DES DÉFIS DE SOCIÉTÉ Dans Ne laisser personne de côté! le gouvernement du Québec aborde la pauvreté comme une notion complexe ayant des «effets négatifs sur la croissance économique», «des coûts dus à la non-utilisation des ressources humaines»,«des répercussions négatives sur la...

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