Pratiques émergentes en déficience intellectuelle: Participation plurielle et nouveaux rapports

Chapitre 6_Le processus de supervision

Le processus de supervision. Soutenir l’exercice des responsabilités… 171 C H A P I T R E 6 LE PROCESSUS DE SUPERVISION SOUTENIR L’EXERCICE DES RESPONSABILITÉS INDIVIDUELLES ET COLLECTIVES Jean-Pierre Gagnier Université du Québec à Trois-Rivières avec la collaboration de Linda Roy, Lucien Labbé, Constance Lamarche et Colette Gosselin« Sans contexte, les mots, les actes n’ont aucun sens. » Gregory BATESON Les intervenants et les gestionnaires sont des personnes d’action. Or, la variété et la complexité des situations d’intervention auxquelles ils sont confrontés les obligent à ralentir, à examiner la nature et la portée de leurs gestes quotidiens. Chacun d’eux pratique inévitablement deux types de réflexion : la réflexion dans l’action, qui est une conversation permanente avec soi-même et avec d’autres tout en agissant, et la réflexion sur l’action, qui a lieu après l’intervention, qui permet de prendre un certain recul, de réfléchir sur ce qui s’est passé et de préparer la suite. Comment pourrait-il en être autrement ? Il n’existe pas de réponses absolues et définitives aux défis que pose la pratique. En fait, les intervenants et les gestionnaires développent leurs comp étences en s’engageant activement, en confrontant leurs connaissances aux leçons de la vie et en traduisant leur pratique en savoir. Ils ont tout avantage à se mettre en position d’apprendre et à conjuguer la réflexion 172 Pratiques émergentes en déficience intellectuelle et l’action. Dans ce chapitre, nous nous intéresserons aux liens entre le savoir et la pratique et nous proposerons de considérer le processus de supervision comme un mécanisme d’apprentissage permanent. Ce texte se fonde sur notre expérience de supervisions individuelles et collectives auprès de psychoéducateurs, d’intervenants psychosociaux, de conseillers cliniques et de gestionnaires. La réflexion proposée témoigne de nos sensibilités particulières aux personnes présentant une déficience intellectuelle, à leurs proches, aux membres de leur environnement social et aux intervenants engagés de tout cœur auprès d’eux. En nous inspirant des leçons tirées de notre pratique et en profitant de l’apport de quelques repères théoriques, nous chercherons à démontrer l’importance de la supervision clinique dans la construction des savoirs professionnels et dans le processus de soutien aux intervenants et aux collectifs d’intervention. La première partie de ce chapitre présente la supervision comme une source privilégiée de soutien à l’intervention et propose une réflexion sur la nature et les objectifs de la supervision. Dans la deuxième partie, nous examinons les liens entre le savoir et la pratique et nous proposons d’envisager le processus de supervision comme un mécanisme d’amélioration continue. Dans la troisième partie, nous présentons des compétences requises pour l’exercice de la supervision clinique et quelques défis fréquemment relevés par les superviseurs et les conseillers cliniques qui la pratiquent dans les organisations de services en déficience intellectuelle. 1. LA SUPERVISION : UNE SOURCE ESSENTIELLE DE SOUTIEN À L’INTERVENTION 1.1. L’intervention en déficience intellectuelle est à la fois simple et complexe La remise en question des réflexes de prise en charge des personnes vulnérables et l’ampleur des défis posés par une réelle intégration sociale incitent à sortir des ornières creusées par une centration excessive sur des clientèles vues comme cibles uniques d’intervention. Nous assistons depuis quelques années à l’émergence d’une pratique familiale et communautaire plus ancrée dans les divers milieux de vie. Les services spécialisés et l’intervention communautaire prennent davantage en consid ération l’entourage immédiat des personnes vivant avec une incapacité Le processus de supervision. Soutenir l’exercice des responsabilités… 173 intellectuelle et les communautés d’appartenance. Sous l’impulsion d’une équipe d’intervention enracinée dans le milieu, le partage des expertises et des ressources est activé dans les contextes locaux. La prise en considération de la diversité et de la complexité des situations d’intervention et les particularités des contextes de pratique exigent simultanément un accroissement des compétences cliniques et un engagement intense dans les milieux de vie. Ainsi, dans le contexte...