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C H A P I T R E AMBIGUÏTÉ DE L’ORIENTATION SEXUELLE Pierre Dalens C’est dans le cas où se manifestent le plus intimement la frustration et la sublimation ainsi que l’attirance vers l’autre, jamais satisfaite, que nous retrouvons l’ambiguïté des identités de rôle à partir d’un noyau d’identités de genre bien constitué. Souvent l’imaginaire est en discordance avec le réel entraînant un clivage important avec la réalité. Illustrations cliniques ARMELLE Armelle a 45 ans lorsque Jean-Pierre fait sa connaissance au cours d’une réception; Jean-Pierre a vingt ans de plus qu’elle. Ils s’intéressent tous les deux aux sciences humaines et à la psychologie relationnelle, bien que ce ne soit pas la profession d’Armelle, qui est cependant dans une profession libérale de la santé. Jean-Pierre est un professionnel connu, et ils vont rapidement avoir une activité ensemble. Après une année de formation avec Jean-Pierre, dans des groupes de travail, Armelle devient l’assistante de Jean-Pierre. Un lien à la fois professionnel mais surtout 10 160 ÉROS AU FÉMININ – ÉROS AU MASCULIN relationnel, affectif et imaginaire les rapproche rapidement; cette relation se heurte vite aux obstacles de la réalité sociale, puisqu’ils vivent dans des lieux éloignés et qu’ils ont chacun leur univers familial et conjugal. C’est une satisfaction essentiellement fantasmatique pour Armelle, qui ne réalise un désir plein et entier que dans l’imaginaire lui permettant de se déculpabiliser d’une situation qui la confronte à la transgression. Cet état la ferait sortir du cadre qu’elle s’est forgé de tout temps sous la pression d’un père aimant mais autoritaire et exigeant, décédé depuis de nombreuses années. Armelle fait une distinction très précise entre sa vie officielle et sa relation amoureuse; d’une part, il y a sa vie aisée dans une petite ville du sud de la France, sa vie professionnelle, sa famille, l’attachement symbiotique et angoissé qu’elle porte à son unique fils Gilles, son mari Jean-François avec qui elle travaille, mais dont elle parle fort peu, le tenant en quelque sorte dans l’ombre d’une certaine neutralité; d’autre part, elle parle peu de tout cela avec Jean-Pierre, sauf de sa relation très angoissée avec Gilles, qui est «le fils amant lunaire». Sa relation avec Jean-Pierre a été relativement érotisée à un niveau prégénital, fait de caresses tendres, d’attentions de l’un à l’autre, mais aussi de caresses génitales pouvant aboutir à l’orgasme quand les inhibitions ont pu céder; mais il y a peu de relations coïtales, rendues difficiles par le désir mal assumé d’Armelle et les obstacles émotionnels chez Jean-Pierre. Il y a une barrière à son désir, qui est également peu marqué avec Jean-François son mari. Avant de rencontrer Jean-Pierre, elle n’aurait fait cette formation expérientielle que pour découvrir et fortifier sa sexualité. Dans sa vie antérieure, elle parlait de « relations sexuelles hygiéniques» et peu fréquentes de la part des deux partenaires habituels. Par contre, à chacune des rencontres avec Jean-Pierre, ils ont ensemble de nombreux contacts corporels, mais les relations coïtales sont toujours délicates. Elle s’est dite à ce moment de sa vie génitale «femmefontaine » et préorgasmique. Cela ne gêne pas les deux amants qui se satisfont beaucoup mieux du partage de leurs fantasmes et de leur imaginaire dans une sexualité de contact et surtout de longs dialogues axés sur le partage émotionnel. C’est un échange intense dans les moments espacés de leurs rencontres. Cependant, au bout d’un an, les séances de groupe ne deviennent plus possibles du fait d’un changement de lieu; le seul échange entre les amants devient essentiellement intellectuel et affectif par l’intermédiaire de communications téléphoniques quotidiennes. L’érotisme est encore présent dans le langage par moments, mais il prend de moins en moins d’importance pour céder la place à un échange amoureux de plus en plus intense et émotionnel de la part de Jean-Pierre et dont Armelle se satisfait entièrement. Les mots servent maintenant de caresses par la voie des ondes. Curieusement, cette présence, absente dans le réel, entraîne un...

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