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LES CRISES SONT TOUJOURS CELLES DES AUTRES René-Jean Ravault, Ph.D. Université du Québec à Montréal 84 Communications en temps de crise Le constat de l'écart, pour ne pas dire du gouffre, qui existe entre, d'une part, la perception des acteurs qui se trouvaient au sein du « triangle noir » pris, durant la quasi-totalité du mois de janvier, dans une gigantesque panne d'électricité qui était pour eux, la principale et souvent l'unique source de chaleur et d'énergie et, d'autre part, la perception des spectateurs montréalais qui n'ont connu que l'« inconfort » d'un manque d'éclairage de quelques heures, m'a paru digne d'un long préambule. 8.1. LE CONSTAT Un malheur n'arrivant jamais seul, avant même que commence l'année 1998, 1997 s'était fort mal terminée pour moi. Tout au long de l'automne, ma soeur me fit savoir que la santé de mon père, âgé de 93 ans, se détériorait. Dès que les cours furent terminés, je me précipitai en France où mon père était encore en vie. À mon arrivée, il était toujours conscient et me reconnut mais il n'agissait plus de façon coordonnée. Après quelques jours et sur l'avis du médecin, nous décidâmes de le faire entrer en clinique où, moins d'une heure après son admission, il sombra dans le coma. Comme personne ne savait combien de temps cet état allait durer et que les médecins étaient certains qu'il ne reprendrait pas conscience, je décidai de retourner au Québec pour passer Noël avec la famille que j'y ai fondée il y a plus de 30 ans et préparer les cours de la session d'hiver, sachant qu'il me faudrait sous peu revenir en France. Une fois de retour, pour quelques jours, au Québec, je fus vite rappelé à des considérations plus terre à terre. Après avoir passé Noël en famille, je sortis de chez moi, inconscient qu'il était tombé une petite pluie verglaçante sur Bethléem ainsi que sur Carignan, je glissai et tombai sur le dos dans l'escalier de pierre qui hausse mon logis au-dessus du plancher des boeufs et des ânes. « Oh la vache ! » m'écriais-je, les reins en compote et incapable de me relever. J'ai compté les moutons des bergers de la crèche de mon voisin d'en face pendant près d'une demi-heure en attendant (sous la pluie verglaçante) que mon épouse, ma fille et son compagnon (qui ne m'entendaient pas) viennent me ramasser à la petite cuillère. Une semaine après, ayant réussi à faire quelques pas hors du lit pour répondre au téléphone, ma soeur m'apprit que mon père était décédé ! Nous décidâmes alors de nous rendre tranquillement à Dorval en quête d'un restaurant ouvert pour nous mettre quelque chose sous [18.119.107.96] Project MUSE (2024-04-25 13:42 GMT) Chapitre 8 - Les crises sont toujours celles des autres 85 la dent. Le parcours de l'itinéraire généralement anodin CarignanDorval, fut épique ou, devrais-je dire, «hippique». En effet, il fallut sauter les obstacles composés de toutes sortes de choses: branches déjà au sol ou pendantes, fils électriques ou téléphoniques ou vidéotroniques se dandinant comme des serpents dans la forêt amazonienne - quelques degrés en moins, s'entend blocs de glace tombés ou tombant des superstructures métalliques des ponts. Enfin, après quelques heures de rodéo et de train fantôme, nous arrivâmes à Dorval ayant oublié que nous avions faim ! Arrivé en France, tout se déroula comme prévu avec, en plus de toutes les tracasseries typiques de la bureaucratie française et les peines inhérentes à la perte d'un être cher, l'inquiétude grandissante que suscitait le sort des deux dames âgées qui habitaient le rez-dechaussée de ma demeure québécoise ainsi que l'état même de cette demeure toujours privée d'électricité et ensevelie sous la glace et les branches tombées des arbres du voisinage. Bien que je connaissais le côté fabulateur et dramatisant de mes deux locataires, les descriptions des événements qu'elles...

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