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« Comment mettre le doigt sur la “vraie” Médée à travers toutes les variations du personnage?», demande Hélène Pednault à Marie Cardinal, dans une entrevue insérée à la fin de La Médée d’Euripide. La traductrice répond ce qui suit : Médée est un mythe. D’ailleurs, on ne pourra jamais savoir la vérité de Médée, en admettant qu’il y en ait une. Enfin, disons réalité plutôt que vérité. Car, toutes les Médées sont vraies. Elles portent toutes la vérité de ceux qui les racontent, c’est ce qui est intéressant dans l’étude des mythes. (120) Ainsi, Médée est protéiforme dans ses divers contextes culturels et contemporains de même que dans ses incarnations de la vérité pour celui ou celle qui l’aborde et s’affaire à en créer un récit. Who or what is Medea?, s’interroge cette fois la classiciste Marianne McDonald. Is she a living being? A goddess? A character performed by an actress? A symbol? A text? The ancient text? A modern recreation? Many texts? Words heard on the stage or words read in a book? How do we translate her for ourselves? (Ancient 116) Médée,c’estlerécithérité,maisaussitôtfabriqué,transposéet supplémenté au fil des époques et des courants de pensées. Ainsi en est-il de tous les récits mythiques, notamment de la Grèce antique. Toujours déjà une mythopoesis ou le résultat instable Chapitre 1 Médée, une poétique du mythe Médée protéiforme 38 d’une transcription perpétuelle, Médée incarne une poétique du mythe multiforme, sa pluralité provenant de ses riches amalgames depuis l’Antiquité21 . Cela ne signifie pas que le mythe ne puisse aussi conserver sa «fonction iconique» (P. Bido, ct. ds. Platon-Hall 154) figée dans l’imaginaire collectif. Les forces mythiques auxquelles Médée vient parfois se soumettre et contre lesquelles elle vient aussi s’insurger s’inscriront en effet dans la thématique des œuvres étudiées. C’est bien la mythopoesis et ses procédés de réécriture au féminin, constamment mis en relief, qui dégageront le sujet mythique des contraintes de son propre mythe. Mais que peut une littérature du mythe dans une société contemporaine ayant professé la mort des « grands récits »22 , aspect fondamental de la condition postmoderne selon JeanFran çois Lyotard ? Cette condition ne nous oblige-t-elle pas à repenser l’inscription des mythes en fonction d’une certaine supplémentarité derridéenne, Médée se voulant un signifiant continuellement différé (Scott 23) à travers les siècles, les civilisations , les discours? La supplémentarité est inhérente à tout mythe qui mène, évidemment, à son herméneutique, mais qui est davantage « déjà lui-même le produit d’une interprétation » (Platon-Halle 154). Or, si les intertextes mythiques qui surabondent dans la littérature contemporaine en sont pour quelque chose, on est loin «de croire que nous en aurions fini avec les mythes» (Eissen et Engélibert 3). 21. Selon Sarah Iles Johnston, la Médée du Ve siècle athénien est déjà le fusionnement de deux figures différentes effectué dans le courant de l’ère archaïque (850-450 av-J.C. : la figure de la déesse corinthienne Médée, liée, de façon ambigüe, à la mort de ses enfants et de ceux de la cité, et à la figure de la princesse colchidienne ayant assisté aux exploits des Argonautes). Voir Johnston, p. 45 et pp. 65-66. 22. Par ailleurs, c’est la question fondamentale du volume collectif La dimension mythique de la littérature contemporaine, quatrième de couverture. [3.16.83.150] Project MUSE (2024-04-25 08:36 GMT) Médée, une poétique du mythe 39 L’approche théorique et la méthode de lecture comparative et féministe de notre étude se développent à partir de l’exploration de diverses théories du mythe et de pratiques mythopoétiques. Nous cherchons ici à en déceler les rapports aux reprises du mythe de Médée par les femmes de lettres de notre ère contemporaine ainsi qu’à préciser les enjeux intertextuels et théoriques des traitements contemporains et féministes du mythe médéen. Mythe...

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