Le Fédéralisme: Une introduction

Chapitre quatre : Le partage des compétences : qui fait quoi et comment?

24฀ Le฀fédéralisme฀:฀une฀introduction IV Le partage des compétences : qui fait quoi et comment? Deux modèles d’attribution des pouvoirs légaux Il y a deux approches très différentes touchant la répartition des compétences au sein des fédérations : le modèle bipolaire et le modèle intégré. De nombreux pays ont adopté des éléments des deux modèles. Le modèle bipolaire attribue généralement différentes compétences à chaque ordre de gouvernement, qui met ensuite en œuvre et administre ses propres programmes. Le modèle intégré prévoit le partage de nombreuses compétences, et les gouvernements des entités constituantes administrent souvent des lois ou des programmes légiférés de façon centrale. En vertu du modèle fédéral bipolaire, ou classique, les compétences constitutionnelles dans différents domaines sont en général attribuées exclusivement à un ordre de gouvernement. Suivant ce modèle, chaque ordre de gouvernement assure généralement l’exécution de programmes dans son domaine de compétence, en utilisant sa fonction publique et ses ministères; les ministères du gouvernement fédéral sont donc présents dans l’ensemble du pays. Dans les faits, le modèle bipolaire n’effectue pas de séparation nette des compétences, car un grand nombre de questions présentent des dimensions régionales, nationales et même internationales, et bon nombre des différentes compétences des gouvernements se trouvent elles-mêmes interreliées. ฀ George฀Anderson฀—฀Forum฀des฀fédérations฀ 25 • Dans toutes les constitutions bipolaires, on trouve des compétences partagées ou des compétences concurrentes dans le cadre desquelles les deux ordres de gouvernement peuvent légiférer. Le Canada et la Belgique disposent de peu de compétences concurrentes, alors que l’Australie a des compétences concurrentes très étendues. Quand les compétences sont concurrentes, généralement, bien que pas toujours, les lois fédérales l’emportent, c’est-à-dire qu’elles prévalent en cas de différend. • De plus, on peut rencontrer des concurrences de facto lorsque les deux ordres de gouvernement disposent de pouvoirs différents sur une question : il s’agit d’une forme de compétence partagée qui ne fait généralement pas appel à la prépondérance. Par exemple, dans les constitutions moins récentes, l’environnement ne constitue généralement pas une rubrique de compétence, mais les deux ordres de gouvernement peuvent disposer de pouvoirs légaux différents leur permettant de réglementer les répercussions environnementales d’un important projet d’infrastructure, qui ne pourra aller de l’avant que si les deux ordres donnent leur accord. En vertu du modèle fédéral intégré (ou interdépendant), illustré par l’Allemagne, certains domaines relèvent exclusivement d’un ordre de gouvernement (p. ex., la défense relève du gouvernement fédéral), mais la plupart des domaines sont de compétence concurrente, en ce sens que le gouvernement central établit des lois-cadres que les entités constituantes peuvent renforcer (mais non enfreindre) avec leurs propres mesures législatives. De plus, les gouvernements des entités constituantes assurent l’exécution de certains programmes dans ces domaines concurrents. Le gouvernement central dispose donc d’une modeste fonction publique dans les régions, dont la tâche se limite aux domaines de compétence exclusive. On appelle aussi parfois ce modèle fédéralisme administratif parce que les principales compétences des entités constituantes sont administratives. Le grand défi à relever avec ce modèle consiste à s’assurer que les politiques du gouvernement central ne sont pas trop détaillées de manière à laisser une place aux décisions et 26฀ Le฀fédéralisme฀:฀une฀introduction aux lois des entités constituantes. Le modèle allemand permet également la prise de décisions conjointes touchant ces domaines de concurrence, en ce sens que les lois fédérales pertinentes doivent être approuvées par une majorité de voix des représentants des Länder au Bundesrat (chambre haute). L’Afrique du Sud a également adopté certains aspects de ce modèle. Le Canada, le Brésil et les États-Unis constituent des exemples de fédérations surtout bipolaires; l...