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359 Bridges haine partagée entraîna. Il y a dans cette hideuse forgerie historiographique une charge de racisme anti-amérindien si puissante qu’en déterminer la portée à de multiples niveaux se présente comme une tâche immense dont l’histoire prendra encore beaucoup de temps à s’acquitter. Pourtant, il y va de notre fierté et de notre respectabilité en tant que nation,d’abord à nos propres yeux,puis aux yeux des autres nations. Notre pays, le Canada, ne trouve pas son origine dans le combat glorieux d’ancêtres européens contre des peuples sauvages brutaux et méprisables ; de tels peuples n’existent d’ailleurs tout simplement pas. Notre pays prend plutôt directement son origine dans la riche pensée circulaire d’une merveilleuse et antique civilisation autochtone que le Canada et le Québec ont encore à découvrir. Comme l’a magistralement écrit l’ethno-historien Bruce Graham Trigger dans la deuxième édition de son important livre Huron Farmers of the North, parue en 1989, les Hurons n’avaient, même peu avant les événements qui aboutirent à leur dispersion finale, aucune raison d’agir par crainte des Iroquois. Au début de ce livre, Trigger réfute de façon concluante l’analyse de nombreux spécialistes sur le sujet de l’arrangement démographique du Wendaké, le pays des Wendats. Parlant de la logique culturelle pluriséculaire en force chez ce peuple, Trigger remarque que cette confédération travaille, même aux heures sombres de sa fin déjà imminente,en fonction de l’organisation du vaste monde commercial et diplomatique dont elle est le centre. Le Wendaké est un paysc œur densément habité et intégralement organisé pour le commerce avec des centaines de peuples alliés comprenant des centaines de milliers d’individus, dont beaucoup apprennent et parlent le wendat ; l’Iroquoisie est un territoire fermé sur lui-même,peuplé peu densément de 20 000 à 0 000 mille personnes appartenant à cinq nations vivant loin les unes des autres, de l’autre côté du lac Ontario. Quels Iroquois pouvaient donc tant aspirer à aller exterminer les Wendats ? Et quels Wendats allaient donc négliger leur fonction centrale dans leur riche monde commercial pour aller assouvir leur propre soif irrépressible du sang de leurs parents hodenosaunee ? En termes historiques très concrets, la France commit l’incommensurable faute de gaspiller l’énorme avantage politique et démographique que lui conféraient ses très nombreux alliés amérindiens en négligeant d’assister ceux-ci Les premières civilisations des Amériques 360 matériellement et militairement, au même moment où les Hollandais équipèrent librement et sans compter les cinq nations de l’Hodenosaunee et, contre toutes les probabilités, défirent pour toujours l’écrasant pouvoir français. Quant à eux,Hurons et Iroquois travaillèrent fréquemment à s’unir pour protéger leurs intérêts communs contre leurs instables et souvent perfides alliés européens, mais ceux-ci réussirent toujours, surtout grâce à leurs services d’espionnage opérés nommément par leurs missionnaires religieux, à frustrer les plans des Sauvages, quels qu’ils soient, et à avancer leur propre cause. Voilà comment, pour arranger l’histoire à leur convenance, les religieux historiens français ont créé et forgé le mythe de la destruction des Hurons par les Iroquois. Mais comment ce mythe amoindrit-il les raisons de notre fierté d’être Canadiens, d’être Québécois ? J’ai créé la question et voici la meilleure réponse que je puisse offrir. D’abord, il est certain que tout processus d’appropriation coloniale doit s’accompagner d’une justification idéologique et religieuse. Le mythe de l’Iroquois victorieux n’est qu’une variante historiographique propre à notre contexte d’un tel besoin de justification.Mais il est également dans l’ordre de l’évolution d’une société qu’une telle mythologie soit un jour soumise à un examen à la lumière des faits et de la raison. Je crois que la période, dans l’évolution de notre société canadienne et québécoise, de la négation du fait et de la contribution des premiers peuples (amérindiens, inuit, métis) est maintenant révolue. Si je me fie aux jeunes gens avec lesquels j’interagis, surtout dans mes classes de philosophie et d’histoire des autochtones, les jeunes et les nouveaux...

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