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Indien sans terre mais avec plume 185 Les Amérindiens, par leur nature contemplative, cherchent à comprendre le sens des choses, des gens et des cultures. Selon la philosophie amérindienne, le chiffre 4 est celui de l’équilibre : il y a quatre temps de la vie, quatre moments du jour, quatre directions, quatre couleurs sacrées et quatre grandes familles de peuples avec chacune leur position autour du Cercle. La position du nord correspond à la famille de peuples européens à laquelle est associée la couleur blanche et l’élément de l’air, qui représente le mouvement. Les Européens sont les maîtres du mouvement, pour le meilleur et pour le pire. C’est ainsi que nos Anciens ont toujours dit que leur venue n’était pas accidentelle. Les Européens iront probablement sur d’autres planètes,car c’est le mouvement qui donne sens à leurs rêves et à leur histoire. Nos anciens affirment également que le temps du mouvement tire à sa fin. Nous avons reçu le plus de bénéfices possible de cette ère du mouvement, de cette façon européenne d’agir. Si l’on se fie à la direction de la course du soleil, nous devrions arriver à une nouvelle ère. Ce serait à la position de l’est, c’est-à-dire précisément celle des peuples amérindiens, d’occuper une place prépondérante. Contrairement au mode de pensée européen principalement linéaire, l’Amérindien croit que nous sommes Un, tous unifiés dans le grand Cercle de la vie. Cette conception métaphysique a bien sûr des répercussions politiques : la démocratie ne doit pas comprendre seulement les êtres humains, mais aussi tout ce que l’on conçoit comme êtres existants. Il semble y avoir une tension inhérente à la philosophie amérindienne en ce qui a trait à l’individu. Quelle est la marge de manœuvre pour l’individu, dans cette philosophie circulaire où tout dépend de tout ? Les penseurs du Cercle ont toujours eu une jalousie sans borne,et même légendaire , pour leur liberté individuelle, en autant que cette liberté signifie la liberté d’être responsable pour soi-même et pour les autres. C’est véritablement le « un pour tous et tous pour un ». Par ailleurs, quelle liberté peut-il rester à l’individu appartenant à une philosophie linéaire lorsque l’on force celui-ci à croire en des L’Amérindien philosophe 186 systèmes philosophiques et politiques qui ne protègent que les intérêts des gens les plus puissants et les plus habiles à perpétuer le système ? Si la pensée occidentale a fourni les justifications nécessaires à certains individus pour légitimer leur propre autorité, la pensée occidentale a également donné naissance à des tendances dites « progressistes » qui rêvent d’un monde meilleur. Il y a ainsi une riche tradition messianique, héritée en partie du judaïsme, mais qui se retrouve en philosophie politique chez les penseurs utopistes, libéraux et marxistes. Pourquoi attendre des messies quand on peut exercer son jugement et sa raison par soi-même ? Les messies interviennent dans des systèmes où l’humain a été opprimé intellectuellement et spirituellement. Les philosophies progressistes promettent des messies libérateurs parce qu’il y a eu une oppression prolongée. Cette stagnation idéologique, spirituelle et sociale ne peut se résoudre que dans une révolte. L’Europe, justement, a souvent connu la révolte et même la révolution. Quelle place occupe l’idée de révolte dans la pensée amérindienne ? Le penseur linéaire sait dans son tréfonds que le monarque, le dictateur, le politicien fourbe est là pour rester et que, même renversé, le système le « réincarnera ». Il n’y a plus de place pour la foi, l’espoir. Intrinsèquement, le penseur circulaire n’est pas enclin à la guerre. Sa foi en la nature et envers le Créateur lui dit que les choses,si on leur donne le temps et l’espace,vont reprendre leur place dans le grand ordre naturel. En général, l’Amérindien ridiculise le dirigeant abusif ou corrompu. Si cela ne suffit pas à corriger la situation, il remplacera ce dirigeant selon une volonté qui vient du peuple, et ce, en dépit des systèmes politiques colonialistes imposés et dont on...

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