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Les immigrants préférés«Je savais qu'en Belgique on demandait des gens pour travailler dans les mines, mais je ne savais pas ce que c'était une mine. »«Je me disais que si les autres pouvaient lefaire, moi aussije lepouvais. »21 Le courage n'empêche pas la peur et la souffrance de vivre dans l'atmosphère étouffante des galeries souterraines.« Vraiment, c'était un travail insupportable, mais au moins on avait un travail. »22 Victime de deux éboulements successifs, un mineur conclut : «Après cet incident, j'ai eu peur de rester à nouveau coincé, mais j'ai continué le travail parce qu'il le fallait : je devais nourrir mes frères et sœurs [...] Il fallait de la volonté pour aller travailler dans les mines en Belgique, w23 Et un Italien originaire des Fouilles, contraint d'émigrer parce que son père était mort et qu'il était le seul soutien de sa famille assure : « C'était mieux d'aller à la guerre qu'à la mine. »24 Certains tentent d'échapper à l'enfer par des stratagèmes pour se faire reconnaître inaptes et pouvoir occuper un poste en surface. D'autres suivent des cours du soir pour être acceptés à l'atelier de mécanique. Même si le salaire de mineur de fond est unanimement estimé comme « un bon salaire pour l'époque », le rêve de la plupart des mineurs italiens est de quitter la mine. Parfois un accident dont ils sont témoins est le déclic qui motive leur détermination. Ainsi, un mineur d'Italie centrale, pourtant l'un des rares à avoir eu une expérience de la mine avant d'arriver en Belgique raconte :« Un jour, il y a eu un éboulement. Le mineur qui était à côté de moi a pris un morceau de charbon dans le cou et il est mort sur le coup. Son corps s'est affalé sans vie sur moi. Après cela, la peur m'a envahi. Je n'ai plus voulu aller dans la mine. J'ai demandé à changer de puits mais c'était toujours la même chose. C'est ainsi que je me suis décidé à quitter la Belgique etj'ai fait une demande pour aller au Canada. » 20 Albino Lezzi, originaire des Fouilles (29/07/1929), interviewdu 24 novembre 1992, à Montréal. 21 lanunzio Dangelo, originaire des Abruzzes (1933), interviewdu 8 décembre 1992, à Toronto. 22 Mario Tricolle, Napolitain (10/07/1929), interviewdu 1er décembre 1992, àMontréal. 23 Témoignage de Bruno Borsato, un des rares Frioulans(22/07/1928), interviewdu 25 novembre 1992, à Montréal. 24 Francesco Farella, originairedes Fouilles (21/01/1931), interview du 25 novembre 1992, à Montréal. 25 Francesco Zaccari, originaire des Marches (02/11/1915), interviewdu 13 décembre 1992, à Toronto. Il avait travailléprécédemment dans une mine en Grande-Bretagne. 166 Des halo-Belges au Canada Ce ne sont sûrementpas les charmes des anciens camps de prisonniers dans lesquels ils sont logés qui les retiendront. Pourtant, ceux qui étaient alors célibataires évoqueront encore, près de cinquanteans plus tard, les carnavals, la bière belge, les« ducasses », les bals et les cafés, les joyeuses escapades dans les autres localités.« II y avait beaucoup d'amusement, w26« Oh, la vie était agréable en Belgique en dehors de la mine. Il y avait nettement plus de vie, d'amitié et de fraternité qu'au Canada. »27 Le deuxième départ On vient de voir que le caractère épuisant et dangereux du travail dans les mines belges a été déterminant pour pousser un certain nombre d'Italiens à risquer une deuxième migration. Certains pressentaient en outre qu'au-delà des risques d'accidents il y avait à long terme des risques graves pour leur santé.« Quand je voyais que l'on crachait noir, j'ai pris peur. Autrement dit, tout le monde savait que la vie était courte en travaillant dans la mine. Je me suis dit que la santé étaitprimordiale. Tout le monde désirait travailler en Belgique, mais pas dans la mine ! Il y avait quelques possibilités de sortir de la mine, mais ilfallait avoir des recommandations et de toute manière, ce n'était pas facile. Et puis, ce n'était pas honnête, parce qu'il y avait des Italiens malades de la poussière, de claustrophobie, etc. et qui voulaient travailler dehors (moi-même j'ai essay...

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